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Existe‑t‑il actuellement un mouvement pro-syndicat au Canada?

Depuis quelques temps, on s’aperçoit qu’il y a, au Canada, une augmentation du nombre de grèves et une hausse perceptible des tentatives de syndicalisation dans tous les secteurs industriels. Cette tendance sera‑t‑elle passagère ou fera-t‑elle partie d'une nouvelle tendance dans le monde du travail? Seul l’avenir nous le dira. Par contre, il est clair que l'incertitude économique grandissante, la pandémie de COVID‑19, l'exposition aux mouvements mondiaux de syndicalisation et la capacité d'adaptation des syndicats à trouver de nouvelles méthodes et de nouveaux marchés sont autant de facteurs qui contribuent au déploiement de l'activité syndicale que nous observons actuellement au Canada.

(a) Incertitude économique grandissante et pandémie de COVID‑19

Dans une tentative agressive de modération de l’inflation croissante, la Banque du Canada a augmenté le taux d'intérêt à son plus haut niveau depuis 1998. Si l'on ajoute à cela la persistance de la pandémie de COVID‑19, le conflit en Europe et les problèmes de chaîne d'approvisionnement, tous les facteurs sont réunis pour créer une incertitude économique, qui force les travailleurs à accorder plus d'importance à la rémunération et à la sécurité d'emploi. L’augmentation des salaires demeurant généralement inférieure à l'inflation, les travailleurs recherchent la stabilité et sont plus à même d’être convaincus par les messages syndicaux leur promettant de meilleurs salaires, de meilleures conditions de travail, l'absence de mises à pied, et une place à la table des négociations.

(b) Exposition aux mouvements mondiaux de syndicalisation

Aujourd'hui, la syndicalisation se déroule sur des plateformes de médias sociaux populaires comme Twitter et TikTok. Ces plateformes permettent aux organisateurs syndicaux de construire leurs messages pour non seulement cibler des milieux professionnels spécifiques et leurs travailleurs, mais aussi d'étendre la portée de leurs messages à l’échelle mondiale. Des entreprises telles que More Perfect Union ont même développé des outils interactifs, à savoir une carte permettant de suivre les demandes d'accréditation de syndicalisation de certaines entreprises.

(c) Nouvelles méthodes et nouveaux marchés

Les syndicats deviennent de plus en plus créatifs aussi bien dans la façon dont ils font leur entrée dans les milieux de travail que dans leur choix des secteurs d’activité. Par exemple, en 2022, Uber Canada a conclu un accord avec les Travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce (« TUAC ») qui permet aux chauffeurs et livreurs de la plateforme Uber partout au Canada de pouvoir être représentés par les TUAC. Uber et les TUAC se sont également engagés à faire conjointement pression sur le gouvernement pour qu'il introduise une législation offrant de meilleurs avantages sociaux et d'autres droits aux travailleurs.

Les syndicats trouvent également le moyen de pénétrer dans des nouveaux marchés. Récemment, 16 travailleurs d'une entreprise de jeux vidéo ont voté à l'unanimité pour se syndiquer sous l'égide des TUAC. Les travailleurs ont cité des préoccupations d’ordre économique telles que l'augmentation du coût des loyers, de la nourriture et de l'essence comme étant un des facteurs ayant fait naître leur désir de syndicalisation. Selon la CBC, il s'agit d'une première dans l'industrie des jeux au Canada, et seulement la troisième situation du genre en Amérique du Nord.

Certains syndicats ont même fait campagne pour améliorer les dispositions relatives au travail à domicile et intégrer de telles protections dans les conventions collectives; un sujet d’intérêt pour de nombreux travailleurs ces deux dernières années.

Importantes considérations pour les employeurs

Il ne fait aucun doute qu’au cours de l’été et de l’automne, nous assisterons à une augmentation de l'activité syndicale au Canada sous forme de syndicalisation, de demandes d'accréditation et de grèves ou de lock‑out, car les travailleurs ressentent les effets de l'augmentation du coût de la vie.

Les employeurs qui n’ont pas de syndicat au sein de leur entreprise devront demeurer vigilants face à cette réalité. Les employeurs devraient se concentrer sur les éléments suivants :

(a) Transparence. Les travailleurs pensent (souvent à tort) que leurs conditions d'emploi et même leur environnement de travail sont moins bons que dans d’autres entreprises. Lorsque qu’ils peuvent le faire, les employeurs devraient trouver un moyen pour gérer ce sentiment d'instabilité et d'injustice. Par exemple, ils pourraient choisir d’effectuer plus fréquemment des évaluations de rendement, et de donner plus souvent une rétroaction pour permettre aux travailleurs de mieux comprendre comment l’employeur perçoit leur rendement en temps réel, ce qui atténue les suppositions et le choc qui accompagnent parfois une évaluation annuelle. En outre, la transparence à l’égard du rendement de l'entreprise et de ses plans pour l'avenir permet d'éviter les suppositions et peut même donner aux travailleurs un sentiment accru d'appartenance.

(b) Création d’un meilleur environnement de travail. Les efforts de syndicalisation se concentrent souvent sur les points sensibles et les défis perçus au sein d'une entreprise, avec à la clé une promesse de changement. Les employeurs devraient apprendre à identifier et à aborder les points sensibles soulevés par les travailleurs. Lorsque cela est possible, le fait d’offrir des avantages sur le plan de l’emploi peut contribuer à améliorer la situation.

(c) Canaux de communication efficaces. Les efforts de syndicalisation font généralement suite à des périodes d'insatisfaction au niveau des travailleurs. Si les travailleurs ont l'impression que leurs idées et leurs expériences sont entendues et prises en compte par la direction, ils peuvent être moins sensibles aux efforts de syndicalisation. Les travailleurs doivent avoir un moyen de communiquer avec la direction, que ce soit par le biais d'un formulaire en ligne ou d'un autre canal. Les employeurs devront trouver une façon d'être à l’écoute des besoins des travailleurs. Pour ce faire, ils peuvent tenir régulièrement des réunions ou des assemblées générales pour permettre aux travailleurs d’établir une discussion avec la direction.

Qu’ils restent stables ou qu’ils augmentent, les efforts de syndicalisation seront toujours une préoccupation pour les entreprises faisant affaires au Canada. Notre équipe est prête à aider les employeurs à aborder la question. N'hésitez pas à communiquer avec un membre de notre groupe national de Droit du travail et de l'emploi.

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