Passer au contenu directement.

Édition MT❯iplus : Élections récentes aux États-Unis – Retour en arrière et regard vers l’avenir concernant les politiques d’immigration des États-Unis et leur incidence sur le milieu des affaires.

Introduction

Le 5 novembre 2024, à l’issue de l’élection présidentielle des États-Unis (« É.-U. »), Donald Trump a été élu pour un second mandat en l’emportant sur l’actuelle vice-présidente Kamala Harris, après avoir été le 45e président des États-Unis de 2017 à 2021. L’un des sujets brûlants de la campagne présidentielle a été la position de M. Trump sur l’immigration. Alors que l’investiture présidentielle est prévue pour le 20 janvier 2025, il est important pour les employeurs et les membres du milieu des affaires d’examiner les politiques du président élu concernant l’immigration au cours de son premier mandat, afin de mieux se préparer à la réalité sous le nouveau gouvernement.

Politiques concernant l’immigration sous le gouvernement républicain de 2017 à 2021

Pendant le mandat de Donald Trump, de 2017 à 2021, des objectifs précis ont été fixés très tôt pour traiter des questions liées à l’immigration. Les objectifs visés par l’agenda de M. Trump en matière d’immigration comprenaient notamment :

  • Construire un mur à la frontière séparant le Mexique des États-Unis;
  • Réduire et sanctionner l’immigration illégale;
  • Mettre fin aux programmes sociaux mis en place pour protéger les immigrants illégaux;
  • Instaurer une interdiction de voyager et renforcer le contrôle de l’entrée aux États-Unis.

Deux objectifs que le gouvernement Trump a réalisés au cours du mandat de 2017 à 2021 et qui ont eu un effet considérable sur le milieu des affaires sont les objectifs de rendre les emplois et les prestations publiques inaccessibles aux immigrants illégaux et de réformer le système d’immigration légale.

Pour atteindre son but de désactiver le «Jobs and Benefits’ Magnet » (Aimant d’emplois et de prestations sociales), le gouvernement Trump a tenté d’étendre l’utilisation d’E-Verify par les employeurs. En tant que système de vérification des autorisations d’emploi, E-Verify permet aux employeurs de vérifier si leurs employés potentiels ont le droit de travailler en comparant leur nom et leurs données d’identité à des bases de données fédérales. Bien qu’aucune loi n’ait été adoptée pour imposer l’utilisation généralisée d’E-Verify dans les états, le décret du gouvernement et les encouragements publics ont tout de même permis, au cours de l’année 2017, d’augmenter le nombre d’employeurs utilisant E-Verify de 64 739 à un total de 760 499[1].

En 2017, le gouvernement a également publié un décret intitulé « Buy American and Hire American » (Acheter américain et embaucher américain) afin de proposer des mesures visant à donner la priorité aux citoyens américains plutôt qu’aux travailleurs étrangers[2]. Par ce décret, le gouvernement, en collaboration avec les services américains de citoyenneté et d’immigration (« U.S. Citizenship and Immigration Services, USCIS ») et le ministère américain du Travail (U.S. Department of Labor), a renforcé son contrôle sur les demandes de visa d’emploi et a intensifié ses efforts pour s’assurer que les titulaires de visas dans le pays respectaient les conditions de leurs visas. Ces mesures visaient spécifiquement les visas H-1B pour les travailleurs qualifiés, ainsi que les visas étudiants.

En ce qui concerne les visas H-1B, l’USCIS a publié des politiques visant à exclure les postes de programmeurs informatiques de premier niveau de l’admissibilité au visa[3]. De plus, pendant plusieurs périodes entre 2017 et 2021, l’USCIS a suspendu le traitement prioritaire des demandes, qui permettait aux employeurs ou aux ressortissants étrangers de payer un supplément pour que leur demande soit traitée dans un délai de 15 jours au lieu d’un an ou plus. L’USCIS a également annulé sa politique de déférence qui lui permettait de traiter les demandes de renouvellement de visas sur la base de l’approbation antérieure des visas et a empêché les entreprises connexes de déposer plusieurs demandes liées au plafonnement du nombre de visas H-1B pour le même travailleur en cours d’arrivée. Cette dernière stratégie était utilisée par certains employeurs pour augmenter leurs chances d’obtenir des visas H-1B lors de la loterie annuelle[4].

D’autres efforts ont été déployés par l’USCIS pour donner la priorité aux postes à haut salaire dans le cadre du programme de visas H-1B. Par exemple, la loterie pour les visas H-1B a été modifiée pour donner la priorité aux candidats titulaires d’un diplôme d’études supérieures, en particulier lors du deuxième tour de tirage au sort[5]. Ce changement, en 2019, a entraîné une augmentation de 11 % du nombre de candidats sélectionnés titulaires d’une maîtrise ou d’un diplôme supérieur[6]. Pour pousser les employeurs américains à embaucher davantage de travailleurs américains, le Department of Labor a également augmenté les exigences salariales applicables aux travailleurs étrangers.

Enfin, l’USCIS s’est associé au Department of Labor pour partager des données concernant d’éventuelles fraudes commises par des employeurs participant au système de visas H-1B[7]. L’USCIS a ainsi été autorisé à transmettre les cas de violation potentielle à l’Office of Foreign Labor Certification du Department of Labor lorsque des signes d’utilisation abusive du programme étaient détectés au cours de son évaluation ou lors de contrôles sur le lieu de travail.

D’autres changements ont été apportés dans le cadre de la politique gouvernementale concernant l’immigration :

  • Permettre aux syndicats de soumettre des avis consultatifs positifs ou négatifs directement à l’USCIS concernant les demandeurs de visas O ou P (visas pour les personnes ayant des capacités ou obtenu des réalisations extraordinaires dans les domaines des sciences, des arts, de l’éducation, des affaires, du sport ou du divertissement, ou pour les athlètes, les artistes, les comédiens et leur personnel de soutien essentiel)[8].
  • Création de l’OPT Employment Compliance Unit, chargée de vérifier que les employeurs respectent les conditions de travail et les exigences en matière de rémunération. L’unité a été en mesure d’envoyer des recommandations à l’ICE sur les lieux de travail qui devaient faire l’objet d’une enquête[9].

Politiques concernant l’immigration attendues sous le futur gouvernement Trump

Depuis les dernières élections, plusieurs acteurs et spécialistes du domaine de l’immigration ont formulé des prédictions sur les possibles mesures en matière d’immigration qui seront mises en place.

Le président Trump a également communiqué des éléments de ses projets en matière d’immigration pendant sa campagne, notamment son objectif de procéder à une expulsion massive des immigrants illégaux aux États-Unis. Cet objectif se traduira par de nombreuses réglementations concrètes, l’une d’entre elles consistant à mettre en œuvre des mesures frontalières plus strictes[10]. Le nouveau président a également fait part de son objectif d’accorder la priorité aux emplois des travailleurs américains plutôt qu’à ceux des étrangers. Les employeurs et les membres du milieu des affaires peuvent s’attendre aux changements suivants, plusieurs d’entre eux étant similaires à ce qui avait été initialement mis en œuvre sous le premier gouvernement Trump :

  • Limites plus strictes pour les visas de travail

De manière similaire à ce qui a été fait de 2017 à 2020, le gouvernement Trump est susceptible d’adopter des politiques et des décrets visant à augmenter les exigences pour demander un visa H-1B, à ralentir le temps de traitement des demandes et à établir un plafond sur le nombre de visas qui peuvent être délivrés dans l’année[11]. Le président Trump pourrait également réintroduire des exigences salariales strictes qui décourageraient les employeurs d’embaucher des travailleurs étrangers plutôt que des Américains. Les changements de politique pourraient également affecter d’autres programmes de visas parrainés par l’employeur, comme les transferts intra-entreprise L-1, les visas O et P, les visas TN, les visas professionnels E-3, et d’autres encore.

  • Augmentation des contrôles de conformité sur le lieu de travail et des visites surprises

Dans leurs efforts pour découvrir les immigrants illégaux et procéder à leur expulsion, le gouvernement Trump et ses partenaires, le U.S. Department of Labor et l’USCIS, pourraient mener un plus grand nombre d’audits et d’inspections sur les lieux de travail afin de vérifier si les employeurs respectent leurs exigences en matière d’emploi, s’ils ont enfreint leurs obligations en vertu du formulaire I-9 ou s’ils ont procédé à la vérification de l’autorisation de travail de leurs employés étrangers. En cas d’infraction, les employeurs peuvent s’attendre à des sanctions civiles, monétaires et pénales, ainsi qu’au licenciement et à l’expulsion éventuelle des employés découverts en situation irrégulière. Par ailleurs, dans le cadre de ces enquêtes, il est possible que de nombreux travailleurs étrangers en situation régulière subissent aussi des conséquences négatives[12].

  • Instauration de limites en matière d’autorisation de travail pour les étudiants

À l’instar de ce qu’il a mis en œuvre lors de son premier mandat, le président Trump pourrait introduire des politiques visant à limiter les autorisations de travail, comme la formation pratique facultative pour les étudiants titulaires d’un visa F-1. Sans la possibilité de travailler parallèlement ou après leurs études, les étudiants étrangers risquent de reconsidérer leur projet d’études aux États-Unis.

  • Surveillance accrue aux frontières

En raison des mesures plus strictes qui seront appliquées aux frontières américaines, les employeurs doivent s’attendre à des perturbations concernant leurs voyages d’affaires et ceux de leurs employés, comme l’interdiction d’entrer sur le territoire de certains pays étrangers. Le renforcement de la surveillance lors des entrevues pour l’obtention d’un visa consulaire pourrait rendre plus difficile la planification des voyages d’affaires, des embauches transfrontalières et des déplacements des ressortissants étrangers déjà employés dans le pays et qui souhaitent rentrer à nouveau aux États-Unis.

Pour répondre aux préoccupations liées aux réformes de l’immigration, les employeurs peuvent prendre diverses mesures afin de mieux se préparer à l’avenir.

Meilleures pratiques à adopter pour les entreprises et les membres du milieu des affaires

  • Défendre leur intérêt aux niveaux local et fédéral pour démontrer que les entreprises ont besoin de travailleurs étrangers;
  • S’assurer que tous les formulaires I-9 et les documents d’immigration à l’appui sont conformes à la réglementation en matière d’immigration et procéder à un audit des programmes de conformité internes en vigueur;
  • Examiner les politiques de recrutement pour s’assurer que les descriptions de postes, les salaires et les exigences générales sont conformes aux réglementations en matière d’immigration;
  • Établir un plan d’action et informer les employés sur la manière de se préparer aux enquêtes sur le lieu de travail;
  • Se tenir au courant des politiques concernant l’immigration et consulter des avocats spécialisés dans ce domaine afin de mieux répondre aux besoins actuels et futurs en matière de main-d’œuvre et de respecter les réglementations relatives à l’immigration.

Pour plus d’informations, n’hésitez pas à communiquer avec un membre de MT❯iplus, une division de McCarthy Tétrault.

View 09 MT iplus FR%402x

 

[1] « Trump’s First Year on Immigration Policy: Rethoric vs Reality », Migration Policy Insitute, janvier 2018, https://www.migrationpolicy.org/sites/default/files/publications/TrumpFirstYearImmigrationPolicy_FINAL.pdf

[2] « Four Years of Profound Change: Immigration Policy During the Trump Presidency » Migration Policy Institute, février 2022, https://www.migrationpolicy.org/sites/default/files/publications/mpi-trump-at-4-report-final.pdf, p. 129

[3] USCIS, « Rescission of the December 22, 2000 "Guidance Memo on H1B Computer Related Positions" » (note d’orientation, 31 mars 2017).

[4] USCIS, « Matter of S- Inc, Adopted Decision 2018-02 (AAO Mar. 23, 2018) » (note d’orientation, 23 mars 2018).

[5] USCIS, « Registration Requirement for Petitioners Seeking to File H-1B Petitions on Behalf of Cap-Subject Aliens » Federal Register 84, no 21 (31 janvier 2019) : 888-957.

[6] Rani Molla, « New Immigration Rules Could Prevent Our Next Elon Musk », Vox, 15 avril 2019

[7] Department of Labor, « U.S. Department of Labor and U.S. Department of Homeland Security Enter into a Memorandum of Agreement » (communiqué de presse, 31 juillet 2020); Memorandum of Agreement between DHS USCIS and the Department of Labor, Employment-Based Petition, Labor Certification, and Labor Condition Application Data, 30 juillet 2020.

[8] USCIS, « USCIS Now Accepting Copies of Negative O Visa Consultations Directly from Labor Unions » (communiqué de presse, 14 septembre 2018); USCIS, « USCIS Now Accepting Copies of Negative P Visa Consultations Directly from Labor Unions » (communiqué de presse, 8 février 2019). Au cours des six premiers mois de mise en œuvre, moins de 1 % des demandes de visa O déposées comportaient un avis consultatif négatif, ce qui a donné lieu à sept refus et à trois révocations d’accord pour cause de non-admissibilité. Voir la lettre de Ken Cuccinelli II, directeur intérimaire de l’USCIS, à Jennifer Dorning, directrice du Department for Professional Employees, AFL-CIO, 16 octobre 2019.

[9] ICE, « New SEVP Unit to Oversee Employment Compliance in the OPT Programs and Report on Impact on U.S. Workers » (message diffusé le 13 janvier 2021).

[10] Priscilla Alvarez et Phil Mattingly, « Mass detention and returning migrants to Mexico: Donald Trump’s plans on immigration are coming into focus », CNN (16 novembre 2024), en ligne : <https://www.cnn.com/2024/11/16/politics/donald-trump-immigration-plans/index.html >

[11] Stuart Anderson, « Past H-1B Visa Policies Predict Donald Trump’s Immigration Policy », Forbes (10 novembre 2024), en ligne : <https://www.forbes.com/sites/stuartanderson/2024/11/10/past-h-1b-visa-policies-predict-donald-trumps-immigration-policy/ >

[12] Cornell University Education, groupe de discussion, « Immigration Reform in 2025: What Is Possible? », 20 novembre 2024.

Auteurs

Abonnez-vous

Recevez nos derniers billets en français

Inscrivez-vous pour recevoir les analyses de ce blogue.
Pour s’abonner au contenu en français, procédez à votre inscription à partir de cette page.

[form_control_error]
Veuillez entrer une adresse valide