Meilleures pratiques afin d’atténuer les risques de litiges liés à la COVID-19
Sommaire: Dans le deuxième volet de notre série de trois publications portant sur les litiges et la COVID-19, nous discutons des meilleures pratiques à adopter dès maintenant afin d’atténuer les risques de litiges liés à la COVID-19.
Introduction :
Les conséquences de la COVID-19 sur le milieu des affaires se sont fait concrètement sentir à la mi-mars 2020. Les entreprises se sont alors immédiatement mises en mode « gestion de crise » et ont fait face à plusieurs inquiétudes, notamment concernant les questions d’emploi, les problèmes d’approvisionnement et la nécessité d’adapter rapidement l’exploitation de l’entreprise via des méthodes de travail alternatives, voire même de mettre « sur pause » les activités professionnelles et commerciales. Avec le prolongement de la pandémie en avril et en mai, de nouveaux enjeux se sont manifestés, incluant les questions d’assurance, l’opportunité d’obtenir une aide gouvernementale et bien sûr, la possibilité d’un retour au travail dans des conditions relativement « normales ».
Les perturbations ayant frappé le milieu des affaires au printemps 2020 semblent à présent susceptibles d’engendrer une vague de poursuites. Les entreprises qui poursuivent actuellement leurs opérations, tout comme celles qui prévoient reprendre leurs activités sous peu, pourraient faire face à des litiges de natures variées. Nous nous étions d’ailleurs attardés à quelques-uns des secteurs de risques potentiels de litiges qui guettent les entreprises dans notre article de blogue précédent.
Quels sont les motifs qui justifient le recours à un litige?
D’une manière générale, une action civile est une demande en compensation impliquant au moins deux parties. Le principe de « préjudice » est au cœur de la notion de litige. Le fait de bien saisir la notion de « préjudice » permet à une entreprise de comprendre ce qui motive un demandeur à déposer sa poursuite et permet de prévenir ces « préjudices » potentiels et les actions en justice qui pourraient en découler.
Dans un contexte de pandémie, nous concevons qu’un préjudice potentiel pourrait concerner tant la santé-sécurité d’une personne que des pertes économiques. De plus, le préjudice allégué pourrait résulter de mesures que l’entreprise a implantées, tout comme il pourrait plutôt découler de mesures qu’elle a omis d’adopter. Ainsi, un préjudice est susceptible de survenir en raison du défaut d’une entreprise de respecter ses obligations contractuelles ou légales. D’une manière ou d’une autre, le demandeur fera valoir que la conduite de l’entreprise lui a causé un préjudice. En termes simplifiés, le litige civil requiert un manquement à une ou plusieurs obligations en plus d’un préjudice.
Selon notre expérience, la source de la motivation d’entamer une poursuite demeure très personnelle. Lorsqu’une personne subit un préjudice, elle sera souvent portée à vouloir faire porter le blâme de son préjudice au soi-disant responsable. Le préjudice subit revêt donc souvent moins d’importance que le narratif qui l’accompagne et il revient d’une certaine façon à la cible potentielle de blâme de déconstruire ce narratif. Ainsi, s’il est évidemment important de respecter l’ensemble des directives publiques et toutes autres obligations contractuelles et légales qui s’imposent à l’entreprise, dont l’obligation générale de ne pas causer préjudice à autrui, l’expérience nous enseigne que le fait de veiller à ce que l’entreprise ne soit pas considérée comme une cible potentielle de blâme est une pratique tout aussi importante afin de mitiger les risques de litiges potentiels.
Nous anticipons que le principe de causalité – c’est-à-dire la question de savoir si le comportement en cause a causé le préjudice allégué – sera également une question centrale dans le cadre de tout litige lié à la COVID-19. La causalité est l’un des aspects les plus complexes de la plupart des actions en justice. Cela dit, le fait pour l’entreprise d’entamer d’ores et déjà une réflexion quant au « lien de causalité apparent » peut aider à réduire les risques de poursuites avant même qu’ils ne se concrétisent. Est-ce qu’en apparence la conduite de l’entreprise est, ou pourrait être, un maillon de la chaîne de causalité ayant mené au dommage allégué? Si ce lien « apparent » peut être établi par le demandeur potentiel, ce dernier trouve là une justification pour entamer sa poursuite. En tant qu’entreprise, il est primordial de briser tout lien de cause à effet afin de bien gérer les risques de poursuites.
Réduire les risques de litiges futurs
En cette période de reprise des activités commerciales selon une nouvelle « normalité », nous invitons nos lecteurs à mettre en place un plan détaillé et adapté aux réalités de leur entreprise afin d’atténuer les risques de litiges liés à la COVID-19. L’élaboration d’un tel plan pourrait nécessiter des conseils juridiques adaptés aux particularités de l’entreprise, ce qui n’est pas l’objet de cette publication. Toutefois, de façon générale, les entreprises devraient prendre en considération les éléments suivants :
- Agissez de manière raisonnable: De nombreuses causes d’action concernent la question de savoir si un défendeur a respecté la législation et la réglementation applicables, ce qui implique très souvent la question de savoir si ce dernier a agi de façon raisonnable. Suivre les directives gouvernementales et respecter les standards propres à votre industrie est une façon pour votre entreprise de démontrer qu’elle agit raisonnablement, ce qui réduit le risque de poursuites futures et bonifie la défense de votre entreprise dans le cadre de litiges actuels. Suivez de près les mises à jour des gouvernements et de l’industrie et soyez prêts à adapter vos stratégies afin de vous y conformer. Réfléchissez à l’impression que vos politiques et procédures donneraient à un juge impartial qui entendrait votre affaire. Sont-elles rigoureuses? Donnent-elles l’image d’une entreprise diligente et responsable qui prend ses responsabilités légales au sérieux, même dans un environnement en constante évolution?
- Ne devenez pas une cible: Partagez avec vos employés et vos clients les mesures mises en place afin de respecter les directives pertinentes liées à la COVID-19 de façon à ce que vos parties prenantes soient au courant que vous agissez de manière responsable. Assurez-vous que ce qui est communiqué se reflète dans l’exécution de vos politiques et de procédures. Ce que vous dites et ce que vous faites doivent concorder.
- Soyez informés sur ce qui touche votre industrie : Renseignez-vous sur les poursuites intentées dans le contexte de la COVID-19 contre vos compétiteurs. Cela vous donnera une indication quant à la nature des actions auxquelles vous êtes exposé et des secteurs de risques. Vérifiez si vos politiques et procédures, ainsi que votre plan de reprise des activités couvrent les aspects ayant causé de telles poursuites contre d’autres.
- Préparez un plan d’action en cas de litige : Réfléchissez à la manière dont vous réagiriez à un litige avant qu’une poursuite soit intentée, notamment à la manière dont vous pourriez mitiger les dommages qui en résulteraient. Constituez une équipe de personnes qui seront chargées de gérer les litiges, y compris des personnes à l’affut de vos politiques et procédures liées à la COVID-19 et de leur mise en œuvre. Idéalement, vos équipes de gestion, de relations publiques et votre contentieux juridique devraient se concerter à l’avance de façon à être prêts à faire face à toute action en justice, le cas échéant. Pour optimiser cette coordination, pensez à identifier votre conseiller juridique externe. Le jour où vous recevrez signification d’une demande d’indemnisation de plusieurs millions de dollars ne devrait pas être la première fois où vous consultez votre conseiller juridique externe.
Conclusion
Même les entreprises les plus prévoyantes ne sont pas à l’abri des risques de litiges. Le futur étant incertain, vous pourriez éventuellement faire face à une poursuite ou à une action collective et ce, malgré une bonne préparation et de bonnes intentions. Restez à l’affût de notre troisième et dernier bulletin, dans lequel nous discuterons des meilleures pratiques à adopter dans l’éventualité où votre entreprise ferait face à un évènement déclencheur de litige.