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L’industrie de la construction au québec « sur pause » à compter du 24 mars 2020 – quels sont les impacts juridiques?

Le 23 mars 2020, le premier ministre du Québec, François Legault, a annoncé la suspension, du 24 mars au 13 avril prochain, des chantiers de construction en cours, à l’exception de ceux se rapportant à la prestation de services « prioritaires »[1].

Il est indéniable que les conséquences résultant d’une telle mesure exceptionnelle sont majeures pour les donneurs d’ouvrage, entrepreneurs, firmes de professionnels et autres intervenants de l’industrie de la construction et soulèvent plusieurs questions juridiques qui sont susceptibles d’avoir un impact très important sur leurs activités. 

Le groupe de pratique en droit de la construction et des infrastructures de McCarthy Tétrault demeure à l’affut des développements importants dans ce secteur et sera présent pour vous informer, vous conseiller et vous épauler tout au long de cette crise sans précédent.  À cette fin, nous alimenterons un blog au cours des prochains jours sous la forme de questions et de réponses traitant des enjeux juridiques clés à prendre en considération dans les circonstances et à la lumière de cette importante annonce. Ces enjeux pourraient s’avérer pertinents dans l’élaboration et la mise en œuvre de votre stratégie globale face à la crise.

À cet égard, nous vous invitons à communiquer par courriel avec l’un des auteurs du présent blog afin de nous faire part de toute question qui vous préoccupe dans le cadre de vos activités et qui pourrait être traitée dans une prochaine parution.

Nous débuterons aujourd’hui par un survol des activités visées par la suspension décrétée le 23 mars 2020 et par ses impacts sur vos obligations contractuelles.

  1. Quelles activités de l’industrie de la construction ont été suspendues et quelles sont les exceptions à la suspension décrétée?

Du 24 mars au 13 avril 2020, toutes les activités de l’industrie de la construction sont suspendues, à l’exception des activités dites « prioritaires ». 

Il est donc primordial pour chaque entreprise de déterminer si les travaux en cours qui vous concernent se rattachent à des services ou activités pouvant être considérés comme « prioritaires ». Le Gouvernement du Québec a publié et met régulièrement à jour une liste de services et activités jugés prioritaires. Celle-ci inclut plusieurs services offerts dans le secteur de la construction, notamment :

  • La maintenance et les opérations des infrastructures stratégiques, ce qui inclut : la distribution d’énergie; le maintien des infrastructures publiques; la construction et le maintien d’infrastructure pouvant comporter un risque pour la santé et la sécurité publiques; les services sanitaires; etc.
  • Les firmes de construction pour réparations d’urgence ou pour fins de sécurité;
  • Les électriciens et plombiers et autres corps de métiers pour des services d’urgence;
  • La location d’équipements;
  • Les firmes liées à la maintenance des édifices (ascenseurs, ventilation, alarme, etc.);
  • L’exclusion s’étend également aux entreprises produisant les intrants ou les matières premières nécessaires pour ces services prioritaires.

La liste ci-haut n’est pas exhaustive et vu l’évolution rapide de la situation, elle pourrait ne pas être à jour. Il importe donc de consulter la liste complète disponible à l’adresse suivante : https://www.quebec.ca/sante/problemes-de-sante/a-z/coronavirus-2019/fermeture-endroits-publics-commerces-services-covid19/.

Compte tenu que les exceptions énoncées sont susceptibles de soulever plusieurs questions d’interprétation, vous invitons à communiquer avec nous pour toutes questions au sujet de cette liste. Si vous considérez offrir un service prioritaire et que celui-ci n’est pas inclus, il est possible d’entreprendre des démarches auprès des autorités concernées.  Nous disposons des ressources et de l’expertise requises afin de vous assister efficacement à cette fin.

  1. Quels sont les impacts de la suspension des chantiers en cours sur vos obligations contractuelles?

La récente annonce du premier ministre Legault pousse les divers intervenants de l’industrie de la construction à se questionner sur le statut de leurs obligations contractuelles : seront-elles, elles aussi, sur pause?  Afin de répondre à cette question et afin de bien cerner l’étendue de leurs obligations malgré la suspension de leur chantier de construction, les intervenants de l’industrie de la construction devront se tourner vers les causes d’exonération de responsabilité prévues à leur contrat ou par la loi dont, notamment, celles qui concernent la force majeure.

Le point de départ de cette analyse doit être le contrat entre les parties. De nombreux contrats dans le domaine de la construction prévoient que la force majeure peut libérer une partie de certaines obligations. À cet égard, chaque contrat est unique et chaque cas est donc un cas d’espèce. Il importe de bien analyser la définition de force majeure prévue au contrat et l’impact de cette force majeure entre les parties. À titre d’exemple, certains contrats prévoient expressément que le délai de livraison convenu est repoussé en cas de pandémie, d’urgence sanitaire ou encore lorsque le gouvernement ordonne la suspension du chantier. Toutefois, d’autres contrats pourraient prévoir une définition beaucoup plus générale de ce qui constitue une force majeure. Il faudra alors interpréter cette clause à la lumière de la situation actuelle et de l’impact de la suspension sur l’exécution des obligations visées.

Lorsque le contrat est silencieux, le Code civil du Québec prévoit que la « force majeure » constitue un cas d’exonération de responsabilité. C’est donc dire que, lorsque certaines conditions sont remplies, une partie peut faire défaut d’exécuter une ou certaines obligations contractuelles sans pour autant être tenue de dédommager son co-contractant pour la perte causée. Sera considéré comme « force majeure » l’événement qui est imprévisible (au moment où le contrat a été conclu) et irrésistible en ce qu’il est impossible à éviter et qu’il empêche l’exécution de l’obligation. Ce dernier critère revêt à notre avis une importance particulière dans la situation actuelle. En effet, bien qu’un évènement puisse être qualifié de force majeure, il faut également que celui-ci rende entièrement impossible l’exécution de l’obligation. Les co-contractants doivent donc être diligents et prendre les moyens nécessaires, dans la mesure du possible, afin exécuter leurs obligations ou mitiger leurs dommages tout en respectant les contraintes qui sont imposées dans la situation actuelle.  Chaque cas est un cas d’espèce, comme le veut l’adage, et il est donc important d’analyser vos circonstances particulières à la lumière de ces critères et de la jurisprudence volumineuse qui les interprètent. Nous vous invitons donc à nous contacter afin de discuter plus amplement de votre situation.

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En plus des questions traitées précédemment, la suspension temporaire des activités dans l’industrie de la construction soulève plusieurs questions susceptibles de vous concerner, notamment aux chapitres des assurances, des hypothèques légales de la construction et des procédures en cours et des impacts de la suspension lors de la reprise des activités, que nous aborderons au cours des prochains jours. 

 

Dans l’intervalle, nous demeurons à votre disposition afin de discuter des défis auxquels vous faites face et de répondre à vos questions en cette période d’incertitude.

 

[1]       Décret portant le numéro 223-2020 daté du 24 mars 2020.

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