Projet de règlement sur les plafonds d’émissions de gaz à effet de serre dans le secteur pétrolier et gazier
Le 4 novembre 2024, le gouvernement du Canada a publié le projet Règlement sur les plafonds d’émissions de gaz à effet de serre du secteur pétrolier et gazier (le « Projet de règlement »), qui sera publié dans la prochaine édition de la Partie I de la Gazette du Canada. Pris en application de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, le Projet de règlement établira un système de plafonnement et d’échange qui s’appliquera à un large éventail d’activités industrielles dans le secteur du pétrole et du gaz, y compris la production terrestre et extracôtière de pétrole et de gaz, la production de pétrole à partir des sables bitumineux et la valorisation de celle-ci, la production de gaz naturel liquéfié (GNL) et son traitement.
Le Projet de règlement impose des exigences supplémentaires en matière de réduction des émissions qui vont bien au-delà de celles des régimes provinciaux existants de réduction des émissions, y compris le régime TIER de l’Alberta, le système de tarification fondé sur le rendement (STFR) fédéral, le Règlement sur les combustibles propres et le Règlement sur l’électricité propre.
Vue d’ensemble : le Projet de règlement
Dans un billet antérieur (en anglais seulement), nous avons discuté du cadre réglementaire proposé pour un système de plafonnement et d’échange annoncé en décembre 2023. Dans le cadre du système de plafonnement et d’échange, le gouvernement fédéral fixera un seuil maximal pour les émissions annuelles et délivrera librement des unités d’émission d’une quantité correspondant au plafond. Le Projet de règlement, tel qu’il est énoncé, devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2026 et fixera le plafond initial en fonction des émissions de 2026 (établi selon la formule énoncée dans le projet de Projet de règlement). Ainsi, le plafond correspondant à la première période de conformité, soit de 2030 à 2032, sera inférieur de 27 % aux niveaux d’émissions attribués pour 2026 aux installations visées. Cette réduction devrait correspondre à une diminution de 35 % par rapport aux niveaux d’émission de 2019.
Installations assujetties au système
Les installations qui exercent l’une des activités industrielles prescrites énumérées ci-après sont visées par le Projet de règlement (les « installations visées ») :
- la production de bitume et d’autre pétrole brut, autre que l’extraction du bitume par récupération thermique in situ ou l’extraction de bitume provenant de l’exploitation de surface, y compris :
- l’extraction, le traitement et la production de pétrole brut léger ayant une masse volumique inférieure à 920 kg/m3 à 15 °C;
- l’extraction, le traitement et la production de bitume ou tout autre pétrole brut lourd (ayant une masse volumique supérieure ou égale à 920 kg/m3à 15 °C);
- la récupération thermique in situ de bitume provenant de gisements de sables bitumineux;
- l’exploitation minière de surface des sables bitumineux et l’extraction de bitume;
- la valorisation du bitume ou du pétrole lourd en vue de produire du pétrole brut synthétique;
- l’extraction de gaz naturel et de condensats de gaz naturel;
- la compression de gaz naturel entre les puits de production, les installations de traitement du gaz naturel ou les sites de réinjection;
- le traitement du gaz naturel ou de condensats de gaz naturel en gaz naturel commercialisable et en liquides de gaz naturel;
- la production de GNL.
Obligations des exploitants ꟷ Enregistrement et déclaration
Tous les exploitants d’installations visées doivent s’enregistrer au plus tard le 31 décembre 2025.
Les exploitants de chaque installation visée sont tenus de surveiller et de déclarer annuellement la production provenant de chaque activité industrielle désignée exercée à cette installation visée, ainsi que les quantités de GES a) attribuées à l’installation et b) provenant de toutes les sources d’émissions de l’installation visée.
Les exploitants qui produisent 30 000 barils de pétrole (ou l’équivalent énergétique) ou plus au cours d’un mois donné allant du début de 2024 à juillet 2025 doivent commencer à déclarer leurs émissions et leurs niveaux de production pour 2026 d’ici le 1er juin 2027. Les exploitants qui ne respectent pas l’un ou l’autre de ces critères doivent commencer à déclarer leurs niveaux d’émissions et de production pour 2028 en soumettant un rapport annuel au plus tard le 1er juin 2029.
Conformité
Chaque exploitant est tenu de remettre une unité de conformité pour chaque tonne d’émissions produite. Aux termes du Projet de règlement, les exploitants peuvent remettre trois catégories d’unités de conformité pour couvrir leurs émissions supplémentaires annuelles provenant des installations visées : 1) les unités d’émission; 2) les unités de décarbonation; et 3) certains crédits compensatoires pour GES.
a. Unités d’émission
Chaque année civile, le ministre attribuera librement à chaque installation visée des unités d’émission correspondant à leur plafond d’émission particulier calculé conformément au Projet de règlement. Les unités d’émission sont conçues pour être transférables, ce qui permet aux exploitants de les acheter et de les vendre dans le cadre du système de plafonnement et d’échange. Il n’y a aucune limite au nombre d’unités d’émission qu’un exploitant peut détenir. Il est important de noter que les unités obtenues dans le cadre de ce système ne peuvent pas être utilisées pour satisfaire aux obligations découlant d’autres cadres de tarification du carbone, y compris le système STFR. Au moins 80 % des unités de conformité d’un exploitant doivent être constituées d’unités d’émission. Les 20 % restants peuvent se composer de crédits compensatoires pour GES ou d’une combinaison d’unités de décarbonation et de crédits compensatoires pour GES, comme il est expliqué ci-après.
b. Unités de décarbonation
À l’instar d’un crédit de fonds dans le cadre du règlement TIER, les exploitants peuvent acheter des « unités de décarbonation » pour couvrir jusqu’à 10 % de leurs émissions. Le Projet de règlement fixe actuellement le prix des unités de décarbonation à 50 $ par tonne de CO2e. Contrairement à la tarification des crédits de fonds dans le cadre du règlement TIER, le prix par tonne d’unités de décarbonation ne semble pas être lié au prix national du carbone.
c. Crédits compensatoires pour GES
Les exploitants peuvent utiliser des crédits compensatoires reconnus pour couvrir jusqu’à 20 % de leurs émissions. À l’heure actuelle, seuls les crédits compensatoires délivrés en vertu du Règlement sur le régime canadien de crédits compensatoires concernant les gaz à effet de serre ou les crédits compensatoires provinciaux reconnus en vertu du Règlement sur le système de tarification fondé sur le rendement seront considérés comme des crédits compensatoires pour GES reconnus.
Remise d’unités de conformité
Les exploitants qui produisent plus de 365 000 barils équivalent pétrole (les « grands émetteurs ») par an doivent non seulement déclarer leurs niveaux de production, mais aussi remplir leurs obligations de remise. Un grand émetteur conserve son statut et les obligations qui s’y rattachent, à moins que sa production ne tombe sous la moitié du seuil (182 500 barils) pendant quatre années consécutives. Les obligations de remise imposent à l’exploitant de remettre une « unité de conformité » pour chaque tonne de GES attribuée au cours d’une période de conformité.
La remise totale d’un grand émetteur pour une période de conformité doit être effectuée au plus tard le 31 janvier de l’année qui suit de deux ans la période de conformité (p. ex., si la période de conformité est 2030 à 2032, le grand émetteur a jusqu’au 31 janvier 2034 pour remplir ses obligations de remise).
En outre, un grand émetteur a l’obligation provisoire de remettre des unités de conformité couvrant au moins 30 % de ses émissions de GES pour chacune des deux premières années d’une période de conformité donnée, au plus tard le 31 janvier de la deuxième année suivant cette année de conformité (par exemple, pour l’année de conformité 2030 au cours de la période de conformité 2030-2032, un grand émetteur a jusqu’au 31 janvier 2032 pour remettre des unités de conformité correspondant à 30 % de ses GES en 2030.)
Les nouvelles installations visées bénéficient d’un délai de grâce de cinq ans à compter du début de leurs activités industrielles avant d’être assujetties à l’obligation de remise prévue dans le Projet de règlement. Les émissions de GES attribuées à une nouvelle installation visée sont réputées être nulles jusqu’au 1er janvier de l’année qui suit de cinq années civiles le début de ses activités industrielles.
Étapes suivantes
Le gouvernement fédéral sollicite des commentaires écrits sur le Projet de règlement du 9 novembre 2024 au 8 janvier 2025.
Notre équipe de McCarthy Tétrault suit attentivement la mise en œuvre du Projet de règlement et nous sommes prêts à aider nos clients à comprendre le cadre réglementaire évolutif des politiques de décarbonation et de réduction des émissions. Pour toute question concernant le Projet de règlement, veuillez communiquer avec votre conseiller de confiance chez McCarthy Tétrault ou avec l’un des auteurs du présent billet.