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Québec tente encore une fois de modifier la Loi sur les mines

Le 5 décembre 2013, Mme Martine Ouellet, ministre des Ressources naturelles du Québec, a déposé le projet de loi 70 intitulé Loi modifiant la Loi sur les mines. Contrairement au projet de loi 43 présenté précédemment, le projet de loi 70, quatrième et dernier épisode d’une longue série de tentatives pour réformer la législation minière du Québec, modifierait la Loi sur les mines actuelle au lieu de la remplacer complètement. Il est intéressant de noter que le projet de loi 70, tout comme le projet de loi 43, contient un préambule qui explique les motifs et les objectifs qui sous-tendent la Loi sur les mines modifiée.

Nouveautés

Le projet de loi 70 comprend plusieurs changements importants au régime minier du Québec concernant principalement les droits et pouvoirs des municipalités, une surveillance accrue de l’environnement, des considérations d’intérêt public, des mesures relatives aux avantages économiques et des exigences de consultation des communautés autochtones, ainsi que d’autres modifications au régime de droits et de titres de propriété. À cet égard, le projet de loi 70 traite de la plupart des changements substantiels proposés dans le projet de loi 43, mais d’une manière plus conciliante et en tenant compte, dans une certaine mesure, des intérêts de diverses parties prenantes. Il faut souligner que si le projet de loi 70 est adopté, il n’aura aucun effet rétroactif et s’appliquera donc à compter de la date à laquelle il entre en vigueur.

En outre, l’octroi d’un bail minier sera assujetti au dépôt ou à l’approbation d’un plan de réaménagement et de restauration minière ainsi que d’une étude d’opportunité économique et de marché pour la transformation au Québec. Les projets d’exploitation de mines métallifères dont la capacité de production est de 2 000 tonnes métriques et plus par jour, à l’exception des minéraux des terres rares, devront faire l’objet d’une consultation publique avant qu’un bail minier ne soit octroyé par le gouvernement. Le gouvernement peut imposer des conditions relatives aux retombées économiques des activités minières pour le Québec dans le bail. Pour garantir le respect de ces conditions, le titulaire sera tenu de constituer et de maintenir un comité de suivi avec la communauté locale pour en superviser la mise en œuvre. Dans le cadre des conditions relatives aux retombées économiques, les titulaires de droits miniers seront tenus de fournir certains renseignements au ministre relativement à la quantité et à la valeur du minerai extrait, aux droits versés en vertu de la Loi sur l’impôt minier et à d’autres contributions versées au gouvernement du Québec. Ces renseignements sont rendus publics, à l’exception des données ou des renseignements qui figurent dans les rapports de travaux d’exploration, qui demeurent confidentiels pour une durée de deux ans.

Le pouvoir d’expropriation donné aux titulaires de droits miniers ne pourra être exercé que pendant la phase d’exploitation minière et les titulaires de droits miniers seront tenus de fournir un soutien financier aux propriétaires lors des négociations relatives à l’acquisition de leur maison.

Municipalités

Le projet de loi 70 propose d’accorder de nouveaux droits et pouvoirs aux municipalités, un peu comme le faisait le projet de loi 43. Par exemple, en vertu du projet de loi 70, un titulaire de claim devrait aviser la municipalité qu’il a obtenu un droit sur des terrains municipaux et l’informer avant d’y effectuer des travaux.

Le projet de loi 70 propose également de modifier la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme pour permettre aux municipalités régionales de comté de désigner des parties de leurs terrains comme étant « incompatibles » avec l’activité minière ou assujetties à des conditions spécifiques. Cependant, contrairement au projet de loi 43, le projet de loi 70 prévoit que les municipalités régionales de comté fixeraient ces conditions et que le ministre ne serait autorisé à les fixer que si les municipalités régionales de comté ne l’ont pas déjà fait. De même, contrairement au projet de loi 43, le projet de loi 70 ne permettrait pas au ministre de dispenser un titulaire de droits miniers de ces conditions.

Comme le proposait le projet de loi 43, les changements proposés en vertu du projet de loi 70 s’appliqueraient vraisemblablement à des terres qui relèvent de la compétence des Premières Nations des Cris, qui visent plus de 300 000 km2 dans le nord du Québec. À l’heure actuelle, le gouvernement du Québec est tenu d’aviser, mensuellement, les Premières Nations de l’octroi de tout nouveau claim minier sur les terres situées au sud du 55e parallèle.

Considérations environnementales

Comme le projet de loi 43, le projet de loi 70 prévoit que les exploitants miniers seraient tenus de fournir une garantie financière au gouvernement pour couvrir la totalité du coût prévu du réaménagement et de la restauration d’un site minier. Cette garantie doit être déposée en même temps que le plan de réaménagement et de restauration du site et est assujettie aux conditions établies par le gouvernement au moyen du règlement d’application de la Loi sur les mines.

L’octroi d’un bail minier serait également assujetti à un certificat d’autorisation en vertu de la Loi sur la qualité de l’environnement, ainsi qu’à l’approbation du plan de réaménagement et de restauration du site des exploitants miniers.

Un changement notable en vertu du projet de loi 70 est l’ampleur de l’examen des impacts sur l’environnement auquel serait assujetti un projet minier proposé. En vertu du projet de loi 43, toutes les usines de traitement et tous les projets miniers auraient été assujettis à une évaluation des impacts sur l’environnement. Cependant, en vertu du projet de loi 70, uniquement les projets de mines métallifères dont la capacité quotidienne de production prévue est de 2 000 tonnes métriques ou plus seraient assujettis à une telle évaluation. Les projets dont la production quotidienne prévue est inférieure seraient assujettis à des consultations publiques coordonnées par le promoteur du projet.

Consultations publiques et intérêt public

Comme le projet de loi 43, le projet de loi 70 prévoit que l’octroi d’un bail d’exploitation de substances minérales de surface pour la tourbe, l’activité industrielle ou l’exportation commerciale serait assujetti à une consultation publique préalable. Si le projet de loi est adopté, il permettrait en outre au ministre de refuser ou de révoquer un bail pour des raisons d’intérêt public. Les titulaires de claims miniers seraient également assujettis à des obligations de déclaration relativement à l’exploration ou à la découverte d’uranium.

Retombées économiques

Le projet de loi 70, comme le projet de loi 43, contient diverses propositions visant à accroître les retombées économiques locales et régionales. Par exemple, les titulaires de baux miniers devraient créer et maintenir un comité de suivi afin de maximiser la création d’emplois locaux et l’approvisionnement local. Le comité devrait être majoritairement composé d’intervenants indépendants provenant de la région touchée par l’activité minière. Le comité resterait en place jusqu’à la réalisation du plan de réaménagement et de restauration du site du titulaire.

Le processus de demande d’un bail minier serait un peu moins complexe aux termes du projet de loi 70 que le processus qui avait été proposé aux termes du projet de loi 43. Un exploitant minier qui demande un bail minier aux termes du projet de loi 43 aurait été tenu de soumettre une étude de faisabilité sur la possibilité de traiter des minerais extraits au Québec. Aux termes du projet de loi 70, le demandeur devrait fournir uniquement une étude de marché moins coûteuse sur la faisabilité de transformation au Québec. D’après les conclusions de l’étude, le ministre pourrait exiger de l’exploitant minier qu’il conclue une entente ayant pour objet de maximiser les retombées économiques pour le Québec, en échange du bail minier.

Les titulaires d’un bail minier seraient en outre tenus de fournir des renseignements détaillés sur le tonnage extrait et les paiements de redevances afin de se conformer aux récents changements apportés au régime d’impôt minier du Québec.

Consultations des Premières Nations

Dans ses dispositions introductives, le projet de loi 70 intègre l’obligation générale de consulter les Autochtones établie par les tribunaux à l'égard des activités minières. En outre, au moins un représentant autochtone doit siéger au comité de suivi mentionné ci-dessus pour les projets qui auraient une incidence sur les communautés autochtones. Le projet de loi interdit également l’expropriation des cimetières autochtones. Contrairement au projet de loi 43, aux termes du projet de loi 70, le ministre devrait également adopter et publier une politique spécifique relativement à la consultation des Premières Nations.

Autres changements proposés aux termes du projet de loi 70

Le projet de loi prévoit également ce qui suit :

  • Les titulaires de claims devraient signaler tous les travaux d’exploration effectués à l’égard du claim.
  • Les crédits de travaux expireront après 12 ans.
  • Certains renseignements obtenus dans le cadre de la demande en vertu de Loi sur les mines seraient rendus publics.
  • Les amendes aux termes des dispositions pénales de la Loi seraient augmentées.

Perspectives

Bien que la présentation du projet de loi 70 à l’Assemblée nationale ait suscité peu de réactions de la part de l’opposition, les principaux partis de l’opposition semblent appuyer en général l’adoption du projet de loi. Même si le gouvernement aimerait que le projet de loi soit adopté avant le congé des Fêtes devant commencer la semaine prochaine, le Parti libéral du Québec a insisté pour obtenir plus de temps pour examiner le projet de loi. Il n’est pas certain que cela signifie que la séance actuelle sera prolongée au cours de la période des Fêtes pour examiner et régler les derniers détails du projet de loi 70.

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