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Considérations importantes pour les sociétés canadiennes faisant affaire avec des investisseurs chinois

Depuis les dernières années, de plus en plus d’entreprises chinoises investissent au Canada. Ces investissements prennent diverses formes, notamment l’acquisition de la société ou de l’entreprise canadienne visée, l’acquisition d’une participation majoritaire dans la société ou l’entreprise canadienne visée ou la conclusion d’une coentreprise et l’acquisition d’une participation importante mais non majoritaire dans la société ou l’entreprise canadienne visée. Le présent article décrit brièvement les dix principaux points que doivent considérer les sociétés canadiennes qui envisagent de faire affaire avec des investisseurs chinois.

1.  L’identité et le statut de l’investisseur chinois

Il est d’abord important de déterminer si l’investisseur chinois est une entreprise d’État ou une entreprise privée et, dans le cas d’une entreprise d’État, s’il s’agit d’une entreprise d’État du gouvernement central ou provincial ou d’un autre palier de gouvernement. Le statut de l’investisseur chinois aura une incidence sur le processus d’approbation, le processus décisionnel et la marge de manœuvre en matière d’investissement. Bien assimiler cette question dès le début des négociations sera très utiles pour la société canadienne quant au meilleur moyen non seulement de négocier l’opération, mais aussi d’établir les paramètres de la relation à long terme.

2.  Nature de l’investissement

Il est important de comprendre l’objectif de l’investissement proposé pour l’investisseur chinois. L’important pour lui est-il d’acquérir une participation majoritaire ou s’intéresse-t-il plutôt à l’exploitation, au rendement économique, à accéder à la gestion de projets ou à la technologie de la société? Cette information aidera la société canadienne à élaborer une stratégie et une méthode de négociation en vue de conclure une bonne affaire.

3.  Qui sont les principaux décideurs de l’investisseur chinois?

Afin d’éviter toute frustration inutile, il est important pour la société canadienne de bien comprendre le processus décisionnel chez l’investisseur chinois, notamment à savoir qui est la personne ou le groupe clé qui doit être convaincu avant de poursuivre les discussions et quel est le meilleur moyen d’établir la communication ou des liens avec ces décideurs afin de bien comprendre leurs besoins et exigences. Ce processus décisionnel des sociétés d’État peut être sensiblement différent de celui des entreprises privées et peut varier d’une société chinoise à l’autre selon le contexte, l’histoire, etc. Une société canadienne pourrait éprouver des difficultés à s’y retrouver, et l’importance de votre conseiller dans les négociations avec des investisseurs chinois pourrait s’avérer d’une importance critique.

4.  Bien comprendre les approbations requises des différentes autorités gouvernementales

Il est notamment important de bien saisir le sens des approbations requises pour la transaction du point de vue du gouvernement chinois, p. ex., la Commission du développement et de la réforme nationale (CDRN) et le ministère du Commerce (MDC), qui représentent respectivement les gouvernements central et provinciaux de la Chine, et l’Administration du change de l’État (ACE). En outre, il faut comprendre les délais applicables ainsi que les exigences pour l’obtention des approbations ou consentements au Canada. Il est également très important que toutes les parties fixent et acceptent, le plus tôt possible, un échéancier tenant compte de toutes les variables externes ou applicables à des tiers, de manière à ce que toutes les parties connaissent exactement les détails et le moment des opérations envisagées.

5.   La langue et les besoins de traduction

Dans le cas de certaines entreprises chinoises, les principaux décideurs ne sont peut-être pas très à l’aise avec la langue anglaise. Il est donc important d’établir un plan afin d’assurer une communication efficace pendant la négociation et la rédaction de documents. La traduction de documents juridiques peut être longue et coûteuse. La société canadienne devrait toutefois envisager de faire appel à une personne (soit un employé fiable ou un membre du personnel d’un conseiller) qui comprend le chinois (tant le mandarin que la langue écrite). Il sera ainsi possible d’éviter des méprises importantes dans le cadre des communications relatives à l’opération pouvant entraîner une « surprise » de dernière minute ou un « malentendu irréparable » après y avoir investi beaucoup de temps et d’efforts.

6.  La préparation de la vérification diligente — Commerciale, financière et légale

À l’instar de quelque autre opération, plus la société bénéficiaire d’un investissement est préparée à répondre à des demandes de vérifications diligentes, plus l’opération se déroulera harmonieusement. Cette préparation est particulièrement importante pour les investisseurs chinois, puisqu’ils sont d’une culture d’entreprise différente et il est important de convenir rapidement d’un processus et d’un échéancier pour la vérification diligente qui satisferont les deux parties. Selon le niveau d’expérience internationale de l’investisseur chinois, il est également important de s’assurer qu’il retient le plus tôt possible les services de conseillers qui seront familiers avec la manière nord-américaine de conclure des affaires.

7.  Les questions de relations publiques

Selon la taille et la nature de l’opération, planifier tôt les relations publiques et la perception de l’opération peut faire la différence entre une affaire avortée ou une affaire conclue. Ceci est particulièrement important dans le cas d’opérations largement médiatisées visant de grandes entreprises canadiennes ou des fleurons nationaux bien connus. La planification des relations publiques peut également être déterminante dans le cas d’investissements susceptibles de porter atteinte à la « sécurité nationale » en vertu de la Loi sur Investissement Canada.

8.  La confidentialité

Il est souhaitable de signer le plus tôt possible une convention de confidentialité appropriée avec l’investisseur chinois. Il est également important de savoir que la propagation prématurée de nouvelles ou de rumeurs à propos d’une éventuelle opération avec un investisseur chinois peut avoir un effet défavorable important sur la volonté et la capacité de l’investisseur chinois de donner suite à l’opération. C’est pourquoi, du point de vue d’une société canadienne, il importe de veiller à ce que l’existence de l’opération proposée et l’information s’y rapportant ne soient connues que des membres de la haute direction qui doivent en prendre connaissance et à ce que le caractère confidentiel de l’opération soit rigoureusement préservé.

9.  L’engagement et le détachement possibles d’employés de l’investisseur chinois après la clôture

Ceci est particulièrement important pour les opérations qui visent une coentreprise ou une collaboration continue entre la société canadienne et l’investisseur chinois. Les parties doivent déterminer quels postes au sein du conseil et de la direction devront être occupés par des candidats de l’investisseur chinois après la clôture. Il est important également de bien comprendre la portée des exigences locales pour les administrateurs et les membres de la direction, particulièrement si la compagnie canadienne est cotée en Bourse ou si elle est un émetteur assujetti. Il existe des pratiques nord-américaines en matière de gouvernance d’entreprise différentes de celles de la République populaire de Chine, notamment en ce qui a trait aux exigences relatives à l’indépendance des administrateurs, à la présence des administrateurs aux réunions du conseil et à l’apport des administrateurs au conseil. Il existe également des obligations d’admissibilité (contrôle des références) pour les administrateurs et les dirigeants de sociétés ouvertes. Des communications claires et des attentes réalistes à l’égard de ces questions faciliteront la réalisation de l’opération.

10.  La législation applicable et la résolution des différends

Même si ceci peut paraître un simple détail, convenir tôt dans les négociations de la législation applicable et du processus de résolution des différends peut aider les parties à résoudre les questions difficiles, notamment si les parties doivent entretenir une relation à long terme après la clôture. Outre le choix des règles d’arbitrage classiques et d’un lieu d’arbitrage (Hong Kong et Singapour étant les plus courants), on peut envisager de recourir à des spécialistes faisant office de quasi-arbitres, notamment un cabinet d’experts-comptables (généralement neutre) pour la résolution des différends en matière de finances et de comptabilité d’une coentreprise projetée, etc. Bien comprendre tous les rouages des règles d’arbitrage applicables et la crédibilité des lieux d’arbitrage applicables, et trouver des spécialistes pouvant faire office de quasi-arbitres à l’égard de certaines questions peuvent permettre aux parties de résoudre des questions difficiles qui soulèvent des incertitudes après la clôture.

À l’instar de quelque autre opération, connaître son partenaire, se préparer autant que possible et obtenir des conseils de gens d’expérience dans le domaine visé sont autant de facteurs clés pour une opération réussie et permettront d’établir les bons paramètres pour la relation continue. Les sociétés canadiennes ne doivent pas laisser les mythes et les craintes non fondées à l’égard des investisseurs chinois les empêcher de saisir des occasions d’investissement et d’affaires exceptionnelles. Des sociétés partout dans le monde ont déjà une longueur d’avance sur les sociétés canadiennes quant aux avantages d’un investissement en Chine et au potentiel de l’énorme marché chinois. Les sociétés canadiennes ont beaucoup à offrir, qu’il s’agisse notamment de ressources ou de technologie; c’est pourquoi nous espérons que dans la prochaine décennie des sociétés canadiennes et des sociétés chinoises unissent leurs forces pour créer des leaders mondiaux plus puissants et plus efficaces dans plusieurs secteurs d’activités.

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