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McCarthy Tétrault
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Réforme du cadre législatif de la copropriété divise


August 18, 2025Blog Post

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Au cours des dernières années, plusieurs modifications ont été apportées au régime législatif encadrant la copropriété divise au Québec[1]. Le Règlement établissant diverses mesures en matière de copropriétés divises[2] dont les dispositions sont entrées en vigueur ce 14 août 2025 s’inscrit dans cette volonté du gouvernement de réformer et d’encadrer ce régime. Il permet l’entrée en vigueur de certaines dispositions du Projet de loi 16, dont l’application avait été retardée jusqu’à l’adoption des normes réglementaires s’y rapportant.

Le Règlement aura notamment pour effet de rendre applicables et de préciser les articles 1068.1, 1070.2, 1071, 1106.1 et 1791.1 du Code civil du Québec[3], qui portent sur le carnet d’entretien (le « Carnet »), l’étude du fonds de prévoyance (l’« Étude »), l’acompte versé à un constructeur ou à un promoteur pour l’achat d’une fraction de copropriété divise et l’attestation du syndicat concernant l’état de la copropriété (l’« Attestation »). L’objectif est d’assurer une gestion plus transparente et responsable des copropriétés divises au Québec.

Dans ce contexte, il est essentiel que les acteurs du domaine immobilier, notamment les promoteurs et les syndicats de copropriété soient informés de ces mesures et adaptent leurs pratiques et vérifications diligentes afin de se conformer à ces nouvelles exigences qui auront un impact direct sur leurs obligations légales et la gestion des immeubles détenus en copropriété divise.

Le Carnet d’entretien

Le Carnet doit dresser un inventaire des parties communes de l’immeuble détenu en copropriété, ainsi que des matériaux, équipements et appareils situés dans les parties privatives dont le syndicat assure l’entretien[4]. Il contient un estimé de l’état et de la durée de vie utile de ces matériaux, équipements et appareils et consigne les travaux d’entretien réalisés ainsi que ceux à prévoir dans les 25 prochaines années de la copropriété[5].

L’établissement du Carnet, sa mise à jour et sa révision par le conseil d’administration sont désormais requis par l’article 1070.2 C.c.Q. et visent à assurer un suivi rigoureux de l’état de l’immeuble et des travaux qui s’y rattachent.

Seuls les membres d’un ordre professionnel reconnu par le Règlement[6], soit un ingénieur, un évaluateur agréé, un architecte ou un technologue professionnel, sont autorisés à établir et à réviser le Carnet. De plus, cette personne doit principalement exercer dans les domaines de la gestion, de la construction, de la rénovation, de l’évaluation ou de l’inspection immobilière et ne doit avoir aucun lien direct avec la copropriété ou ses occupants, notamment à titre de gestionnaire ou de membre du conseil d’administration.

Le Carnet devra faire l’objet d’une révision par un professionnel[7] minimalement tous les cinq ans[8]. Toutefois, telle révision peut avoir lieu minimalement tous les dix ans s’il s’agit d’une copropriété de huit parties privatives ou moins, qu’aucune partie commune de l’immeuble n’est située dans un bâtiment et qu’il y a au plus trois étages entièrement hors sol.

L’Étude du fonds de prévoyance

L’Étude est un document qui détermine les montants requis afin que le fonds de prévoyance[9] soit suffisant pour couvrir, au minimum pour les 25 prochaines années, le coût estimatif des réparations majeures et du remplacement des parties communes, tels qu’établis dans le Carnet.

Cette Étude est désormais requise par l’article 1071 C.c.Q. L’article 8 du Règlement précise les informations qui doivent y figurer, notamment le solde du fonds de prévoyance utilisé pour réaliser l’Étude, une estimation du coût de chaque réparation mentionnée dans le Carnet, ainsi qu’une recommandation sur le montant qui devrait être disponible dans le fonds au début de chaque année.

L’Étude doit être effectuée par les mêmes professionnels habilités à réaliser le Carnet, mais elle peut également être réalisée et révisée par un membre de l’Ordre des comptables professionnels agréés du Québec[10]. Elle devra faire l’objet d’une révision par un professionnel au minimum tous les cinq ans[11].

Pour les copropriétés déjà existantes, si l’Étude révèle que le fonds de prévoyance est insuffisant, le conseil d’administration devra ajuster les contributions des copropriétaires afin que le fonds atteigne le montant requis dans un délai maximal de dix ans suivant la date de l’obtention de la première Étude[12].

En revanche, pour les copropriétés nouvellement constituées, tant que la première Étude n’est pas transmise au syndicat par le promoteur, notamment parce que l’assemblée extraordinaire de transition n’a pas encore eu lieu, les sommes à verser par les copropriétaires au fonds de prévoyance devront correspondre à 0,5 % de la valeur de reconstruction de l’immeuble[13].

Délais pour l’obtention du Carnet et de l’Étude et mesures transitoires

Si une copropriété détient déjà un Carnet et une Étude réalisés dans les deux années précédant l’entrée en vigueur du Règlement et que ces documents sont conformes aux dispositions du Règlement, ils resteront valides pour une période de cinq ans[14] à compter de leur date d’obtention, sous réserve des cas d’exceptions précités eu égard au Carnet.

À défaut, les délais à respecter pour la préparation et l’obtention de ces documents sont les suivants :

  • Pour la majorité des copropriété déjà existantes : Le Carnet et l’Étude devront être obtenus par le conseil d’administration au plus tard le 14 aout 2028[15]. Cette échéance est applicable pour toutes les copropriétés où l’assemblée extraordinaire de transition[16] a été tenue plus de 30 jours avant l'entrée en vigueur du Règlement.
  • Pour les copropriétés nouvellement constituées : Si l’assemblée extraordinaire de transition a lieu entre le 15 juillet 2025 et le 12 novembre 2025[17], le promoteur doit fournir le Carnet et l’Étude au syndicat au plus tard dans les six mois suivant la date de tenue de l’assemblée de transition[18].

Si l’assemblée extraordinaire de transition a lieu après ce délai, le promoteur doit fournir au syndicat le Carnet et l’Étude dans un délai de 30 jours suivant la tenue de l’assemblée[19].

À l’avenir, les promoteurs seront donc responsables de requérir le premier Carnet et la première Étude[20], ce qui constitue une nouvelle obligation pour eux.

Le défaut de transmettre ces documents au syndicat dans le délai imparti peut entraîner des difficultés de gestion et engager la responsabilité du promoteur pour le préjudice résultant de cette omission[21].

La Protection des acomptes

L’obligation pour le constructeur ou le promoteur d’une copropriété divise de protéger les acomptes qui lui sont versés par les acheteurs des fractions de copropriété divise a été introduite en 2021 par l’article 1791.1 C.c.Q.

Le Règlement précise les modalités afférentes au dépôt de ces acomptes dans le compte en fidéicommis d’un membre d’un ordre professionnel et indique que la date convenue pour la livraison de la copropriété peut être modifiée s’il y a accord entre les parties[22].

Cette obligation offre une garantie supplémentaire à l’acheteur d’une partie privative. Les promoteurs doivent veiller à ce que les dépôts des acheteurs soient entièrement protégés, que ce soit par un plan de garantie, une assurance, un cautionnement ou un dépôt dans un compte en fidéicommis détenu par un membre d’un ordre professionnel autorisé[23].

Si le promoteur opte pour le dépôt au compte en fidéicommis, seuls les membres d’un ordre professionnel reconnu par le Règlement[24], soit le Barreau du Québec, la Chambre des notaires du Québec, l’Ordre des administrateurs agréés du Québec ou l’Ordre des comptables professionnels agréés du Québec, sont autorisés à détenir l’acompte. Le promoteur doit mandater un professionnel autorisé pour recevoir l’acompte, mais il ne peut jamais le recevoir lui-même, même s’il a l’intention de le déposer dans le compte en fidéicommis du professionnel[25].

Finalement, si le promoteur ne livre pas la fraction de copropriété à la date convenue, l’acompte doit être remis à l’acheteur[26]. Cette date peut toutefois être modifiée par un amendement au contrat préliminaire signée par les deux parties[27].

L’Attestation du syndicat sur l’état de la copropriété

Lors de la vente d’une fraction de copropriété divise, le vendeur a l’obligation de fournir l’Attestation, laquelle doit être préparée par le syndicat et a pour objectif de fournir au promettant acheteur les informations essentielles sur l’unité convoitée et la copropriété afin de lui permettre de prendre une décision éclairée[28].

Selon l’article 10 du Règlement, l’Attestation doit indiquer :

  • Des informations sur la situation financière de la copropriété, incluant notamment le montant du fonds de prévoyance, les contributions aux charges communes, les liquidités du syndicat pour les dépenses courantes, le budget provisionnel de l’année en cours et le montant du fonds d’auto assurance;
  • Des informations matérielles sur la copropriété, incluant un sommaire des inspections et expertises réalisées à l’initiative du syndicat au cours des cinq dernières années, les sinistres ayant affectés l’unité dans les cinq dernières années, les réparations et remplacement des parties communes effectuées au cours des cinq dernières années et celles à prévoir pour les dix prochaines années;
  • Des informations juridiques relatives à la copropriété, incluant les litiges en cours et les modifications apportées à la déclaration de copropriété au cours des trois dernières années à la déclaration de copropriété.

Selon le libellé de l’article 1068.1 C.c.Q., l’Attestation doit être remise par le syndicat au copropriétaire vendeur dans les quinze jours suivant la demande de ce dernier.

L’obligation de remettre l’Attestation commence à partir de la nomination d’un nouveau conseil d’administration suivant la perte de contrôle du promoteur sur le syndicat[29]. Le promoteur n’est donc pas visé par cette obligation.

Conclusion 

L’équipe de McCarthy Tétrault suit attentivement l’évolution du cadre législatif entourant la copropriété divise au Québec. Les modifications récentes soulèvent de nombreuses questions quant à leur application concrète, à leurs impacts pour les différents acteurs du secteur et aux sanctions que pourraient entrainer le non-respect de celles-ci. Pour toute question ou pour discuter des implications de ces changements, n’hésitez pas à communiquer avec l’un des membres de notre groupe de droit immobilier et planification.


[1] Voir notamment la Loi visant principalement l’encadrement des inspections en bâtiment et de la copropriété divise, le remplacement de la dénomination de la Régie du logement et l’amélioration de ses règles de fonctionnement et modifiant la Loi sur la Société d’habitation du Québec et diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, 2019, chapitre 28 (le « Projet de loi 16 »).

[2] Chapitre CCQ, r. 4.1 (le « Règlement »).

[3] RLRQ c CCQ-1991 (le « C.c.Q. »).

[4] Voir les articles 1 et 2 du Règlement.

[5] Voir l’article 3 du Règlement.

[6] Voir l’article 1 du Règlement.

[7] Lequel doit respecter les conditions de l’article 1 du Règlement, précité.

[8] Article 5 du Règlement.

[9] L’article 1071 C.c.Q. défini le fonds de prévoyance comme un fonds, en partie liquide et disponible à court terme, avec capital garanti affecté aux réparations majeures et au remplacement des parties communes. Il est constitué à partir des contributions aux charges communes des copropriétaires, appartient au syndicat et dont l’utilisation est déterminée par le conseil d’administration.

[10] Voir l’article 7 du Règlement.

[11] Article 8 Règlement.

[12] Article 154 du Projet de loi 16.

[13] Article 1071 al.4 C.c.Q.

[14] Voir l’article 14 du Règlement.

[15] Voir l’article 151 du Projet de loi 16.

[16] Il s’agit de l’assemblée au cours de laquelle la gestion de la copropriété est transférée du promoteur au syndicat de copropriété.

[17] Voir l’article 156 du Projet de loi 16.

[18] Voir l’article 156 du Projet de loi 16.

[19] Voir l’article 1106.1 C.c.Q.

[20] Voir l’article 1106.1, al.1, par.1 C.c.Q.

[21] Voir l’article 1106.1, al.2 C.c.Q.

[22] Voir les articles 11 à 13 du Règlement.

[23] Article 1791.1 C.c.Q.

[24] Article 11 du Règlement.

[25] Article 12 du Règlement.

[26] Art.1791.1 al.3 C.c.Q.

[27] Article 13 du Règlement.

[28] Voir l’article 1068.1 C.c.Q.

[29] Article 1068.1 al.3 C.c.Q.

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