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Mise à jour concernant l’IM : Vue d’ensemble des changements

La Convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (l’« Instrument multilatéral » ou l’« IM ») est une convention multilatérale conclue sous l’égide de l’Organisation de coopération et de développement économiques (l’« OCDE ») qui modifie les conventions fiscales bilatérales conclues entre les juridictions participantes afin de mettre en œuvre certaines règles fiscales internationales et de réduire la possibilité pour les groupes de sociétés multinationales d’effectuer de l’évasion fiscale.

Depuis la parution du texte de l’IM le 24 novembre 2016, 84 juridictions y ont adhéré et l’IM couvre aujourd’hui plus de 1 400 conventions fiscales bilatérales[1]. Il convient toutefois de noter que les États-Unis n’ont pas signé l’IM.

Le Canada a signé l’IM le 7 juin 2017. Le 28 mai 2018, le gouvernement canadien a présenté un Avis de motion de voies et moyens[2] en vue du dépôt d’une loi permettant la mise en en œuvre l’IM en droit interne canadien. Moins d’un mois plus tard, le 20 juin 2018, le Projet de loi C-82[3], intitulé Loi sur l’instrument multilatéral relatif aux conventions fiscales, fut déposé. La deuxième lecture concernant ce projet a eu lieu et celui-ci a fait l’objet d’un renvoi au Comité permanent des Finances[4]. Les prochaines étapes du processus législatif de ratification de l’IM par le Canada sont les débats parlementaires sur le Projet de loi C-82 ainsi que son approbation par le Parlement. Si ce projet de loi reçoit la sanction royale, le Canada déposera un avis de ratification auprès du dépositaire de l’IM[5].

La liste des Conventions fiscales couvertes[6] déposée par le Canada comprend 75 de ses 93 conventions fiscales. Cette liste énumère les conventions fiscales qui seront assujetties à l’IM advenant sa ratification à la fois par le Canada et par un cocontractant visé par la liste des Conventions fiscales couvertes, et ce, en vertu de leurs législations nationales respectives. Les conventions fiscales qui ne figurent pas sur cette liste comprennent, outre celle des États-Unis, les conventions fiscales conclues par le Canada avec la Suisse et avec l’Allemagne, probablement en raison des négociations bilatérales actuellement en cours relativement à celle-ci.

L’IM entrera en vigueur à l’égard des conventions fiscales concernées le premier jour du mois qui suit l’expiration d’une période de trois mois débutant à compter de la date à laquelle le Canada et son cocontractant ont tous deux notifié l’OCDE de la ratification de l’IM. À partir de ce moment, l’IM prendra effet, aux fins : (a) des impôts prélevés à la source, dès le premier jour de l’année civile suivante; et (b) de tous les autres impôts, dans les années d’imposition débutant six mois après l’entrée en vigueur de l’IM[7].

Par exemple, si le Canada et le Royaume-Uni notifiaient l’OCDE de l’achèvement de leurs procédures nationales de ratification en décembre 2018, l’IM entrerait en vigueur à l’égard de la convention fiscale Canada–R.-U. le 1er avril 2019. L’IM prendrait alors effet à l’égard de la convention fiscale entre le Canada–R.-U. (a) le 1er janvier 2020 pour les impôts prélevés à la source, et (b) pour les autres impôts, à compter du 1er octobre 2019 inclusivement pour les années d’imposition débutant après cette date.

Toutes les juridictions participantes ont été tenues de signer les dispositions sur les normes minimales visant à prévenir l’utilisation abusive des conventions fiscales et à améliorer le processus de règlement des différends[8].

Pour répondre aux situations d’utilisation abusive des conventions fiscales, les juridictions participantes pouvaient, au choix, adopter le critère de l’objet principal (« COP ») ou un COP complété par une version simplifiée d’une règle de limitation des avantages (« LDA »). Le COP empêche l’obtention d’un avantage en vertu d’une convention fiscale lorsque l’obtention de cet avantage était l’un des objets principaux de la réalisation d’une transaction ou d’un arrangement, à moins que l’octroi de cet avantage ne soit conforme à l’objet des dispositions de la convention fiscale en question. Le Canada a choisi provisoirement le COP comme règle régissant l’utilisation abusive des conventions fiscales. À long terme, toutefois, et lorsque cela sera approprié, le Canada cherchera à négocier de manière bilatérale des dispositions détaillées de LDA[9].

Hormis ces dispositions sur les normes minimales, les juridictions participantes pouvaient choisir d’adhérer ou non à diverses autres dispositions. Lorsque le Canada a signé l’IM, il a émis des réserves à l’égard de certaines dispositions de l’IM. Ceci s’explique par le fait qu’une réserve peut être retirée subséquemment à la signature de l’IM, mais qu’il n’existe toutefois aucune procédure pour l’ajout de nouvelles réserves une fois l’IM signé.

Le Canada a depuis exprimé son intention de retirer ses réserves concernant certaines dispositions facultatives portant sur les dividendes (article 8), les gains en capital (article 9), les règles à l’égard des entités ayant une double résidence fiscale (article 4) et l’élimination de la double imposition (article 5). Plus particulièrement, le Canada propose :

  • d’adopter une période de détention minimale de 365 jours pour les actions d’une filiale canadienne détenues par une société étrangère afin que son actionnaire soit admissible à la réduction du taux de retenue d’impôt sur les dividendes lui étant versés par sa filiale canadienne. Les changements de propriétés découlant d’une restructuration ou réorganisation corporative ne seraient pas pris en compte pour les fins du calcul de cette période continue de détention;
  • d’adopter une période de test de 365 jours applicable aux non-résidents réalisant des gains en capital sur la disposition d’actions ou d’autres participations dont la valeur découlerait principalement de biens immeubles canadiens. En bref, l’IM viendrait refuser le bénéfice d’une convention fiscale si ce test est rencontré, et ce, à n’importe quel moment pendant ladite période de 365 jours précédant la disposition;
  • d’introduire une approche permettant de résoudre les situations où des entités (autres que des personnes physiques) ont eu une double résidence fiscale; et
  • d’introduire une disposition permettant à certaines juridictions parties à une convention fiscale de changer de méthode d’allègement de la double imposition, en passant d’un régime d’exemptions à un régime de crédits d’impôt étrangers[10].

 

[1] L’Organisation de coopération et de développement économique. « L’Arabie Saoudite signe un accord historique afin de renforcer ses conventions fiscales » (18 septembre 2018), en ligne : OCDE http://www.oecd.org/fr/fiscalite/beps/l-arabie-saudite-signe-un-accord-historique-afin-de-renforcer-ses-conventions-fiscales.htm.

[2] Ministère des Finances du Canada. « Avis de motion de voies et moyens en vue du dépôt d’une loi mettant en œuvre une convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices » (mai 2018), en ligne : Ministère des Finances : https://www.fin.gc.ca/drleg-apl/2018/adtpfe-edipef-fra.asp.

[3] Parlement du Canada. Projet de loi C-82, en ligne : Parlement du Canada : http://www.parl.ca/DocumentViewer/fr/42-1/projet-loi/C-82/premiere-lecture.

[4] Parlement du Canada. Projet de loi émanant du gouvernement, en ligne : Parlement du Canada : https://www.parl.ca/LegisInfo/BillDetails.aspx?billId=9898204&Language=F.

[5] Tables rondes de l’Agence du revenu du Canada (« ARC »), conférence, 2017-0724151C6 – Table ronde à la conférence de la FCF 2017 — Q8 : Critère de l’objet principal.

[6] Ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement. « Statut de la liste de réserves et des notifications au moment de la signature » (30 mai 2017), en ligne : OCDE : http://www.oecd.org/tax/treaties/beps-mli-position-canada.pdf.

[7] OCDE. « Note explicative portant sur la Convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l’érosion de la base d’imposition », para. 322 à 327, en ligne : OCDE : http://www.oecd.org/fr/fiscalite/conventions/note-explicative-convention-multilaterale-pour-la-mise-en-oeuvre-des-mesures-relatives-aux-conventions-fiscales-pour-prevenir-le-BEPS.pdf.

[8] Ministère des Finances du Canada. « Document d’information : Prochaine étape de la lutte contre l’évitement international abusif » (28 mai 2018), en ligne : Ministère des Finances : https://www.fin.gc.ca/n18/data/18-037_1-fra.asp.

[9] Ministère des Finances du Canada. « Document d’information : Incidence de la Convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices » (7 juin 2017), en ligne : Ministère des Finances : https://www.fin.gc.ca/n17/data/17-054_1-fra.asp.

[10] Supra note 8.

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