Passer au contenu directement.

Les résultats attendus en 2014 concernant l’EBITB – L’OCDE publie son premier ensemble de recommandations

Le Canada et les autres membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ainsi que le G-20 sont engagés dans un projet afin de lutter contre les stratégies permettant « l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices » (EBITB) qu’utilisent les entreprises multinationales (EMN) et s’efforcent d’atteindre les objectifs énoncés dans le Plan d’action concernant l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (Plan d’action), lequel a initialement été annoncé en juillet 2013. Le Plan d’action comprend 15 éléments en vue de lutter de manière coordonnée et compréhensive contre l’EBITB. Dans le budget fédéral canadien de 2014, le gouvernement fédéral a réitéré son engagement de continuer à améliorer l’intégrité des règles fiscales internationales du Canada et a mentionné qu’il participe activement aux travaux de l’OCDE et du G-20 à cet égard. Pour obtenir des commentaires additionnels et plus détaillés sur le Budget 2014, voir le Plan d’action économique de 2014 – La planification fiscale internationale demeure dans la mire du gouvernement.

Le 16 septembre 2014, l’OCDE a publié son premier ensemble de recommandations, s’attardant à 7 des 15 éléments énoncés dans le Plan d’action. Depuis cette publication, l’OCDE a publié, le 1er octobre 2014, un calendrier révisé de consultations pour les parties intéressées (version anglaise), énonçant l’échéancier d’achèvement des ébauches et des consultations publiques dans le cadre du Plan d’action et fixant un certain nombre de dates limites pertinentes tombant dans les derniers mois de 2014 et en 2015.

Le présent article résume brièvement le premier ensemble de recommandations de l’OCDE, lesquelles ont été élaborées grâce au consensus de 44 pays (y compris tous les membres de l’OCDE, les pays ayant accédé à l’OCDE et les pays du G-20) et à des consultations avec les pays en développement, les entreprises, les ONG et d’autres parties intéressées. Les prochains développements quant au projet EBITB doivent être présentés par l’OCDE au plus tard à la fin de 2015. Compte tenu de l’interdépendance entre les 15 éléments du Plan d’action, 4 des résultats attendues en 2014 et abordés plus loin (actions 2, 6, 8 et 13) demeurent sous forme d’ébauches, tandis que l’action 5 ne fait l’objet que d’un rapport provisoire. Chacun de ces résultats sera peaufiné davantage pendant le reste de l’année 2014 et en 2015, notamment afin d’adresser des préoccupations techniques et l’interaction avec les résultats attendus en 2015. Toutefois, les actions 1 et 15 sont considérées finales.

Action 1 : Relever les défis fiscaux posés par l’économie numérique

L’objectif de l’action 1 consiste à comprendre les principales caractéristiques de l’économie numérique, de même que ses questions connexes liées à l’EBITB et la façon de les régler. Le rapport reconnaît qu’il est probablement impossible d’isoler l’économie numérique en tant qu’élément de l’économie générale et que l’économie numérique devient plutôt de plus en plus l’économie elle-même. En outre, le rapport insiste sur la nécessité d’évaluer et de suivre continuellement les avancées de l’économie numérique ainsi que leurs incidences sur les régimes fiscaux. Le rapport indique plusieurs domaines précis d’évolution technologique susceptibles de poser des défis additionnels aux décideurs fiscaux dans un avenir rapproché:

  • ce qu’on appelle « l’Internet des objets » (c.-à-d. les appareils en réseau);
  • les monnaies virtuelles (comme le bitcoin);
  • les progrès dans la robotique avancée et l’impression en trois dimensions (qui peuvent rapprocher les fabricants des consommateurs, touchant les centres de création de valeur dans les chaînes d’approvisionnement et la qualification du revenu d’entreprise);
  • les échanges entre homologues de produits et services;
  • l’accès accru aux renseignements gouvernementaux;
  • la protection renforcée des renseignements personnels, qui sont plus largement accessibles dans l’économie numérique.

L’élaboration des recommandations relatives à l’action 1 a comporté la création, en septembre 2013, du Groupe de réflexion sur l’économie numérique (GREN), organe du Comité des affaires fiscales (CAF) constitué de représentants des pays du G-20 membres et non-membres de l’OCDE, groupe de réflexion qui a lancé de vastes consultations auprès des parties intéressées avant de tirer ses conclusions. Le GREN estime que les questions d’EBITB relatives à l’économie numérique constituent essentiellement des aggravations des risques existants en matière d’EBITB plutôt que des risques uniques, de sorte que les travaux en cours relativement aux autres éléments du Plan d’action comporteront l’examen de l’effet de l’économie numérique sur ces questions.

Toutefois, le GREN a formulé des commentaires concernant les questions particulières suivantes de même que sur les actions futures liées à l’économie numérique :

  • Les solutions à l’EBITB devront garantir que les activités principales ne puissent bénéficier indûment des exceptions au statut d’établissement stable (ES) prévues dans les conventions fiscales et qu’on ne puisse se servir d’arrangements artificiels portant sur la vente de produits et services pour éviter le statut d’ES. Tout cela découle du fait que les fonctions considérées accessoires aux modèles économiques traditionnels deviennent de plus en plus des éléments importants des entreprises dans l’économie numérique. Par exemple, il peut y avoir des cas où le maintien d’un entrepôt local peut constituer une activité principale, de sorte qu’il devrait échapper aux exceptions prévues à l’article 5 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE. À cet égard, les travaux effectués dans le contexte de l’action 7 seront élargis afin d’englober la question de savoir si la portée de l’exemption relative aux ES devrait être limitée de manière à écarter certaines activités préparatoires ou accessoires qui constituent des éléments clés de l’entreprise.
  • Les solutions à l’EBITB devront être guidées par la compréhension de l’importance des actifs incorporels, de l’utilisation des données, de l’expansion des chaînes d’approvisionnement mondiales ainsi que de leur effet sur les prix de transfert à la lumière du fait que les sociétés dans l’économie numérique se fient beaucoup sur les actifs incorporels pour créer de la valeur et produire des revenus.
  • Il y a une crainte à l’effet qu’une EMN exerçant des activités par voie numérique puisse gagner un revenu dans une société étrangère contrôlée (SEC) dans un juridiction à faible imposition en y situant d’importants actifs incorporels et en utilisant ces actifs pour vendre des produits et services numériques sans que ce revenu ne soit assujetti à l’impôt applicable, même si la SEC elle-même n’exerce pas d’activités importantes dans sa juridiction. Dans les recommandations en matière de SEC dans le cadre du Plan d’action, on tiendra compte des règles relatives aux SEC qui ciblent le revenu généralement gagné dans l’économie numérique, tel que le revenu tiré de la vente à distance de produits et services numériques.

La perception de la TVA applicable aux transactions entreprise-consommateur est une question urgente qui doit être adressée immédiatement afin de protéger les revenus fiscaux et pour égaliser les chances entre les fournisseurs étrangers et les fournisseurs nationaux. D’autres travaux relativement à cette question devraient être terminés au plus tard à la fin de 2015.

  • Le CAF doit examiner et préciser la qualification, en vertu des règles actuelles prévues par les conventions fiscales, de certains paiements suivant de nouveaux modèles économiques (p. ex., l’infonuagique).

Action 2 : Neutraliser les effets des montages hybrides

Le projet de recommandations relativement à l’action 2 est séparé en deux parties : la partie 1, qui formule des recommandations portant sur les règles nationales afin de neutraliser l’effet des montages hybrides, et la partie 2, qui expose les modifications recommandées au Modèle de Convention fiscale de l’OCDE concernant les entités transparentes, y compris les entités hybrides.

Les recommandations visent les montages hybrides, qui, de façon générale, par suite de la différence de traitement ou de qualification fiscal entre deux juridictions d’un instrument financier, d’un transfert d’actifs ou d’une entité, permettent la double non-imposition ou un report à long terme, lesquels sont peut-être inattendu par les deux pays. Par exemple, constitue un instrument financier hybride courant l’instrument qui est considéré comme une créance dans un pays et comme une action dans un autre, de sorte qu’un paiement lié à l’instrument est déductible lorsqu’il est payé, mais considéré comme un dividende exonéré d’impôt dans le pays où il est reçu.

En ce qui concerne les recommandations portant sur les règles nationales, le rapport recommande généralement les mesures visant à remédier aux montages hybrides suivantes :

  • refuser l’exonération des dividendes remédiant à la double imposition économique à l’égard des paiements déductibles effectués pour des instruments financiers;
  • introduire des mesures afin de prévenir les transferts hybrides servant à dédoubler les crédits afférents à l’impôt retenu à la source; 
  • améliorer les régimes d’investissement à l’étranger, notamment le régime de SEC, pour assujettir le revenu des entités hybrides à l’imposition de la juridiction de l’investisseur et imposer des obligations de déclaration d’information aux intermédiaires afin d’aider les investisseurs étrangers et les administrations fiscales à appliquer ces règles;
  • mettre en œuvre des règles restreignant la transparence fiscale des entités hybrides inversées membres d’un groupe contrôlé.

Plus particulièrement, les recommandations militent en faveur de règles nationales ciblant les paiements effectués dans le cadre d’un montage hybride qui (i) sont déductibles en vertu des règles de la juridiction du payeur et ne sont pas inclus dans le revenu ordinaire du bénéficiaire ou d’un investisseur lié (ce qu’on appelle la « déduction/non-inclusion » ou « D/NI ») ou (ii) donnent lieu à des déductions en double pour le même paiement (ce qu’on appelle la « double déduction » ou « DD »). Le rapport recommande une réponse à deux volets comportant une règle « principale » de même qu’une mesure « défensive » qui s’appliquerait si l’autre juridiction n’a pas adopté la règle principale.

  • Par exemple, la principale réponse à une situation D/NI comportant un instrument financier hybride consisterait à refuser au payeur une déduction à l’égard du paiement et, à titre de mesure défensive, si la juridiction du payeur ne neutralise pas le montage, alors la juridiction du bénéficiaire du paiement obligerait l’inclusion des sommes dans le revenu ordinaire.
  • Par exemple, lorsqu’un paiement effectué par une entité hybride à sa société mère donne lieu à une situation de DD, la principale réponse consisterait à refuser la déduction en double dans la juridiction de la société mère et, à titre de mesure défensive, si la juridiction de la société mère ne neutralise pas le montage hybride, alors la juridiction du payeur refuserait la déduction afférente à ce paiement.
  • Le rapport formule également des commentaires quant à la portée voulue des règles nationales recommandées, lesquels indiquent que les principales cibles sont les montages faisant intervenir des parties « liées », des « groupes contrôlés » et certains « montages structurés ». Les définitions proposées de ces expressions sont énoncées dans le rapport.

En ce qui concerne les modifications au Modèle de Convention fiscale de l’OCDE, le rapport recommande :

  • de remplacer le paragraphe 4(3) de manière à prévoir que les situations de double résidence en vertu d’une convention fiscale soient réglés au cas par cas (c.-à-d. par entente entre les autorités compétentes des deux États en cause) plutôt que suivant la règle actuelle, qui est fondée sur le lieu du contrôle effectif et qui ouvre la porte à l’évitement fiscal dans certains pays;
  • d’ajouter une nouvelle disposition garantissant que le revenu des entités transparentes soit traité conformément aux principes du rapport de 1999 de l’OCDE sur L’application du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE aux sociétés de personnes. Le rapport souligne que le projet de règles non seulement fera en sorte que les avantages découlant des conventions fiscales seront accordés dans les cas qui s’y prêtent, mais également que ces avantages ne seront pas accordés lorsque ni l’un ni l’autre des États contractants ne considèrent, en vertu de leurs dispositions législatives nationales, le revenu d’une entité comme étant le revenu de l’un de leurs résidents.

Action 5 : Lutter plus efficacement contre les pratiques fiscales dommageables, en prenant en compte la transparence et la substance

Les travaux de l’OCDE sur la concurrence fiscale dommageable ont commencé il y a plus de 15 ans par un rapport de 1998 intitulé Concurrence fiscale dommageable : Un problème mondial. Le rapport provisoire relatif à l’action 5 confirme que le Forum sur les pratiques fiscales dommageables de l’OCDE (FPFD) s’est engagé à mettre à jour ces travaux en mettant la priorité sur l’amélioration de la transparence. Dans le cadre de l’action 5, le FPFD a trois résultats attendus : (i) la finalisation de l’examen des « régimes préférentiels » des pays membres; (ii) une stratégie visant l’élargissement de la participation des pays non membres de l’OCDE; (iii) l’examen de la possibilité de modifications ou d’ajouts au cadre actuel établi par le FPFD pour déterminer si un régime préférentiel donné est dommageable.

En ce qui concerne le premier résultat attendu, le rapport provisoire donne une mise à jour sur deux secteurs prioritaires, le premier étant l’accent renouvelé sur l’importance d’exiger une « activité substantielle » pour tout régime préférentiel. Le deuxième secteur prioritaire est l’élaboration d’un cadre de communication obligatoire et spontané des décisions relatives aux régimes préférentiels (c.-à-d. la communication des décisions touchant un contribuable et liées à des régimes préférentiels que le contribuable a le droit d’invoquer). Dans la mesure où les pays ont en place le cadre juridique nécessaire pour commencer à échanger les renseignements visés par le cadre, il est prévu que celui-ci s’applique à compter de la fin de 2014.

Le FPFD se consacre essentiellement aux régimes fiscaux qui s’appliquent aux revenus tirés d’activités mobiles sur le plan géographique, comme les services financiers et autres activités de services, y compris la fourniture d’actifs incorporels, et plus particulièrement aux régimes qui offrent une certaine forme de préférence fiscale comparativement aux principes généraux d’imposition dans le pays pertinent (p. ex. une réduction du taux d’imposition ou de la base d’imposition ou des modalités préférentielles de paiement ou de remboursement d’impôts).

L’examen des régimes préférentiels des pays membres de l’OCDE a été entrepris à la fin de 2010, tandis que l’examen des régimes préférentiels de pays associés a débuté à la fin de 2013; plusieurs aspects de cet examen sont en cours. Cependant, le processus d’examen a permis jusqu’à maintenant l’identification de 30 régimes préférentiels, dont certains ont été jugés non dommageables alors que plusieurs sont toujours sous examen. Les prochaines mesures à l’égard de l’action 5 consisteront à terminer cet examen pour ensuite faire participer les pays non membres de l’OCDE suivant le même fondement.

Action 6 : Empêcher l’octroi des avantages prévus par les conventions dans des circonstances qui ne s’y prêtent pas

Le 14 mars 2014, l’OCDE a publié aux fins de consultation publique une ébauche relative à l’action 6 et a par la suite reçu plusieurs commentaires, qu’on peut consulter sur le site Web de l’OCDE. La version du 16 septembre 2014 des recommandations relatives à l’action 6 milite en faveur d’une démarche de correction par convention du problème de l’abus des conventions et comporte plusieurs solutions de rechange qui pourraient être adoptées au Modèle de Convention fiscale de l’OCDE. Le rapport indique qu’il y a consensus selon lequel, peu importe la solution de rechange adoptée, l’objectif commun consiste à faire en sorte que les États intègrent à leurs conventions suffisamment de mesures de protection pour prévenir l’abus des conventions, notamment en ce qui concerne le chalandage fiscal.

Le rapport recommande un « niveau minimal de protection », suivant lequel les pays conviendraient d’intégrer à leurs conventions fiscales une déclaration explicite indiquant leur intention commune d’éliminer la double imposition sans ouvrir la porte à la non-imposition ou à l’imposition réduite au moyen de l’évasion ou de l’évitement fiscal, notamment par le chalandage fiscal. De plus, le rapport favorise la mise en œuvre de cette intention commune au moyen de l’utilisation d’une règle anti-abus fondée sur les dispositions de limite des avantages similaires à celles que l’on retrouve dans les conventions fiscales américaines (la règle « LDA »), auxquelles s’ajouterait un mécanisme visant certaines modalités de financement par intermédiaires et/ou d’une règle anti-abus plus générale fondée sur les principaux objectifs des transactions ou des montages (la règle « POT »). La règle POT interdirait l’octroi d’avantages issus d’une convention si « l’un des principaux objectifs » d’un montage ou d’une transaction était l’obtention de ces avantages, sauf si leur octroi serait conforme à l’objet et à l’objectif des dispositions pertinentes de la convention. Le rapport renferme des ébauches des règles LDA et POT et expose les forces et les faiblesses de chaque règle, soulignant qu’elles ne conviennent pas nécessairement à tous les pays (p. ex. en raison de restrictions constitutionnelles ou prévues par le droit de l’UE).

On prévoit que la version définitive de l’action 6 sera publiée en septembre 2015.

Est digne de mention le fait que le Canada s’est attaqué activement à ce problème au moyen de sa législation nationale et de conventions fiscales. La règle générale anti-évitement (RGAE) que renferme la législation fiscale nationale du Canada prévoit déjà qu’elle peut être appliquée de manière à refuser un avantage découlant de l’abus de l’une des conventions fiscales du Canada. Le budget fédéral canadien de 2014 a proposé une règle nationale supplémentaire ciblant le chalandage fiscal, mais le 29 août 2014, le gouvernement fédéral a annoncé qu’il reportait la prise de mesures liées à cette initiative et attendrait plutôt l’achèvement des autres travaux de l’OCDE et du G-20 relativement à l’EBITB. En outre, la convention fiscale récemment entrée en vigueur entre le Canada et Hong Kong renferme des règles POT à l’égard du paiement de dividendes, d’intérêts et de redevances.

Action 8 : Lignes directrices sur certains aspects du prix de transfert d’actifs incorporels

L’action 8 propose l’élaboration de règles empêchant l’EBITB par le transfert d’actifs incorporels entre membres d’un groupe, ce qui nécessitera l’adoption d’une définition claire du terme « actifs incorporels », faisant en sorte que les bénéfices associés au transfert et à l’utilisation d’actifs incorporels soient convenablement répartis selon la création de valeur, l’élaboration de règles sur les prix de transfert ou de mesures spéciales applicables au transfert d’actifs incorporels « difficiles à évaluer » ainsi que la mise à jour des lignes directrices quant aux accords de répartition des coûts.

Le Plan d’action prévoit la poursuite en 2015 des travaux sur les règles de prix de transfert, notamment dans le cadre de l’action 9 (risques et capital) et de l’action 10 (autres transactions à haut risque). Par conséquent, le rapport sur l’action 8 demeure sous forme d’ébauche, certains de ses éléments ne constituant que des ébauches provisoires de lignes directrices dont n’ont pas encore entièrement convenu les délégués.

Constitue l’aspect le plus intéressant du rapport la volonté apparente d’aller au-delà du principe du lien de dépendance et d’envisager des mesures spéciales afin d’identifier des réponses efficaces à certaines préoccupations. Les mesures spéciales suivantes, qui seront examinées au cours de 2015, en figurent parmi les plus importantes :

  • conférer aux administrations fiscales le pouvoir, dans les cas appropriés, d’appliquer les règles en fonction des résultats aux prix de transfert des actifs incorporels difficiles à évaluer et, peut-être, d’autres actifs;
  • limiter le rendement pour les entités dont les activités se limitent à procurer des fonds pour le développement d’actifs intangibles, et potentiellement d’autres activités, par exemple en considérant ces entités comme des prêteurs plutôt que comme des investisseurs de capitaux propres dans certains cas;
  • exiger des modalités de paiement conditionnelles et/ou l’application de méthodes de partage des bénéfices pour certains transferts d’actifs incorporels difficiles à évaluer;
  • exiger l’application de règles analogues aux règles appliquées en vertu de l’article 7 du Modèle de Convention fiscale de l’OCDE à certaines situations comportant la capitalisation excessive d’entités exerçant peu de fonctions.

Aucune décision n’a été prise à l’égard de l’adoption de « mesures spéciales ». Le rapport souligne que les travaux effectués relativement à l’action 8, de même que les travaux en cours relativement à l’EBITB, s’inscriront dans une réponse coordonnée et cohérente aux prix de transfert en général.

Action 13 : Instructions relatives à la documentation des prix de transfert et la déclaration pays par pays

L’action 13 milite en faveur de l’amélioration de la transparence pour les administrations fiscales en prévoyant qu’elles reçoivent davantage de renseignements leur permettant d’effectuer des évaluations et des examens des risques liés aux prix de transfert. On fait valoir dans l’ébauche de rapport que l’amélioration de la transparence est essentielle pour s’attaquer au problème de l’EBITB. Si elles sont adoptées, les recommandations obligeront les EMN à déclarer pour chaque juridiction fiscale où elles exercent des activités : (i) le montant de leur chiffre d’affaire, de leurs bénéfices avant impôt et l’impôt sur le revenu payé et accumulé; (ii) leur nombre total d’employés, leur capital social, leurs bénéfices non répartis et leurs actifs corporels dans chaque juridiction fiscale; (iii) l’identification de chaque entité du groupe exerçant des activités dans une juridiction fiscale donnée ainsi qu’une indication des activités commerciales qu’elles exercent.

Une approche normalisée de la documentation des prix de transfert comportant une structure à trois volets est recommandée. Plus particulièrement, la documentation recommandée consisterait en :

  • un fichier principal contenant les renseignements normalisés pertinents pour tous les membres du groupe de l’EMN;
  • un fichier local mentionnant expressément les transactions importantes du contribuable local;
  • un rapport pays par pays renfermant certains renseignements relatifs à la répartition mondiale du revenu de l’EMN et des impôts qu’elle paie de même que certains indicateurs de l’emplacement de l’activité économique au sein du groupe de l’EMN.

Le rapport comporte en annexes des modèles des fichiers susmentionnés ainsi que la description des types de renseignements qui devraient y figurer. La structure de la documentation proposée ainsi que les types de renseignements à déclarer manifestent l’intention de procurer aux administrations fiscales l’information nécessaire pour déterminer si une partie importante du revenu est attribuée au sein du groupe de l’EMN à des juridictions à faible taux d’imposition où peu d’activités commerciales se déroulent (p. ex. en raison du manque d’employés, d’actifs, etc.).

Dans le rapport, l’OCDE reconnaît que les mécanismes recommandés sont nouveaux et n’ont jamais été mis à l’épreuve. Par conséquent, les normes relatives à la documentation des prix de transfert et aux déclarations pays par pays doivent être réexaminées au plus tard à la fin de 2020.

Action 15 : L’élaboration d’un instrument multilatéral pour modifier les conventions fiscales bilatérales

L’action 15 porte essentiellement sur la façon de mettre en œuvre rapidement les recommandations générées par le Plan d’action, une fois achevé. L’OCDE est consciente du fait qu’il faut beaucoup de temps et de ressources afin d’intégrer au vaste de réseau de conventions fiscales bilatérales les modifications apportées à son Modèle de Convention fiscale. Cela signifie que les conventions bilatérales accusent généralement un retard par rapport au Modèle de Convention fiscale. À la lumière de la portée du projet EBITB (souvent appelé en français le projet BEPS), les gouvernements ont convenu de déterminer s’il était possible de mettre en œuvre un instrument multilatéral qui aurait les mêmes effets que la renégociation simultanée des nombreuses conventions fiscales bilatérales. Cette approche serait sans précédent dans le contexte fiscal, mais a été utilisée dans d’autres domaines du droit international public.

Même si le rapport indique, à la lumière des commentaires des experts en droit international public et en droit fiscal, certaines questions découlant de l’élaboration d’un tel instrument, il conclut qu’un instrument multilatéral constitue une méthode souhaitable et possible de mise en œuvre de certaines des mesures élaborées dans le cadre du projet EBITB qui sont « multilatérales par nature ». Le rapport déclare que les négociations relatives à un tel instrument devraient être engagées dès que possible et, à cet égard, l’OCDE élabore un mandat pour convoquer une conférence internationale à cette fin en 2015.