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Aspects importants relatifs à l’acquisition d’une entreprise culturelle

La Loi sur investissement Canada (« LIC ») régit les investissements étrangers au Canada et s’applique, notamment, aux opérations visant l’établissement ou l’acquisition du contrôle par des investisseurs étrangers d’entreprises culturelles au Canada. Les entreprises culturelles sont définies à l’annexe IV du Règlement sur Investissement Canada comme étant des entreprises canadiennes exerçant l’une des activités suivantes :

  1. la publication, la distribution ou la vente de livres, de revues, de périodiques ou de journaux, sous forme imprimée ou assimilable par une machine;
  2. la production, la distribution, la vente ou la présentation de films ou de matériel vidéo;
  3. a production, la distribution, la vente ou la présentation d’enregistrements de musique audio ou vidéo;
  4. l’édition, la distribution ou la vente de compositions musicales sous forme imprimée ou assimilable par une machine.

Le ministère du Patrimoine canadien est responsable de la réglementation des investissements dans tous ces secteurs.

En vertu de la LIC, une entreprise culturelle supplémentaire est liée à la radiodiffusion et aux télécommunications. Toutefois, Industrie Canada est responsable d’assurer l’examen de ces investissements étrangers, de même que le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes en vertu de la Loi sur la radiodiffusion.

Il est possible, même dans le cas d’une acquisition commerciale, que l’on doive tenir compte de certains éléments culturels d’une entreprise, et qu’un examen de ces éléments doive être effectué. Patrimoine Canadien dispose d’un certain nombre de politiques, certaines écrites et plusieurs non écrites, à l’égard des approches relatives à ces acquisitions. Il est préférable d’évaluer la nature des actifs d’une entreprise canadienne devant être acquise afin de s’assurer que l’entreprise ne comprend aucun des éléments d’actif caractérisant les entreprises culturelles du type indiqué ci-dessus, ou, le cas échéant, que l’entreprise se conforme de façon appropriée à la LIC. La LIC exige qu’un examen soit effectué si la valeur de l’actif de l’entreprise canadienne est supérieure à 5 000 000 $ dans le cas d’une acquisition directe, ou 50 000 000 $ dans le cas d’une acquisition indirecte (notamment, lorsqu’un investisseur étranger fait l’acquisition d’une entreprise culturelle canadienne du fait de l’acquisition de sa société mère à l’extérieur du Canada). Toutefois, le seuil de 50 000 000 $ s’applique uniquement lorsque l’entreprise canadienne faisant l’objet de l’acquisition représente moins de 50 % de l’actif total acquis et qu’elle est acquise par une société étrangère. Si la valeur de l’actif total est supérieure à 50 % ou si l’entreprise canadienne est détenue par une entité non constituée en société, alors le seuil de 5 000 000 $ s’applique. La LIC prévoit un processus d’avis officiel devant être déposé auprès de Patrimoine Canadien, qui décidera si une demande d’examen doit ou non être effectuée par la suite. Le cas échéant, Patrimoine Canadien et le ministre, en vertu de la LIC, examineront si l’investissement est conforme au critère de l’avantage net prévu à l’article 20 de la LIC et si l’investissement est compatible avec les politiques culturelles.

Vous trouverez ci-dessous une brève description des politiques écrites :

  1. Édition et distribution de livres. La politique en vigueur établit plusieurs conditions s’appliquant aux investissements étrangers dans les secteurs canadiens de l’édition, de la distribution et de la vente au détail de livres, et prévoit notamment que l’acquisition directe d’une entreprise sous contrôle canadien existante par une entreprise non canadienne ne sera pas permise. Toutefois, le gouvernement peut faire exception si l’entreprise connaît de réelles difficultés financières et si des Canadiens ont eu pleinement et équitablement l’occasion de l’acheter.
  2. Distribution de films. La politique relative à la distribution de films interdit, notamment, les prises de contrôle d’entreprises de distribution qui appartiennent à des Canadiens et qui sont contrôlées par des Canadiens. Les investissements visant à établir de nouvelles entreprises de distribution au Canada ne seront autorisés que pour des activités d’importation et de distribution de produits de propriétaires (c’est-à-dire dont l’importateur est le propriétaire des droits mondiaux ou est un investisseur important).
  3. Politique de l’édition de périodiques. Cette politique réglemente la publication, la distribution et la vente de périodiques et comprend une évaluation selon laquelle l’avantage net doit comprendre des engagements de la part des investisseurs étrangers à inclure un contenu original majoritaire dans chaque numéro de chacun des périodiques destinés au marché canadien.

Récemment, trois faits nouveaux ont marqué l’investissement dans les secteurs culturels. Tout d’abord, le ministre du Patrimoine canadien a approuvé au deuxième trimestre de 2010 une demande d’Amazon (distributeur de livres) visant à établir une présence physique au Canada sous forme de centre de traitement des commandes. L’investissement a été considéré comme étant à l’avantage net du Canada étant donné que des engagements substantiels étaient fournis par Amazon. Outre cet investissement, aucune autre grande librairie étrangère ne s’est établie sur les marchés canadiens depuis l’inauguration de la politique du livre. Bien que certains avancent que l’approbation de l’entreprise d’Amazon va à l’encontre de la politique du livre, d’autres sont d’avis qu’elle est conforme aux lignes directrices relatives aux engagements qui sont à l’avantage net du Canada et reconnaît l’évolution de la présence d’Amazon. (En 2002, le site Web Amazon.ca a été lancé, et le directeur des investissements de Patrimoine Canadien a établi à ce moment que les activités d’Amazon.com et d’Amazon.ca n’étaient pas assujetties aux dispositions d’avis en vertu de la LIC étant donné qu’Amazon n’avait aucun établissement commercial ni aucun employé au Canada.) En fait, certaines personnes se demandent si la politique du livre existe toujours.

Ensuite, également au cours du deuxième trimestre de 2010, Patrimoine Canadien a examiné et approuvé un investissement effectué par plusieurs personnes liées à M. Carl Icahn visant l’acquisition de Lions Gate Entertainment Corp. de Vancouver (C.-B.). La prise de contrôle proposée du capital-actions de Lions Gate a fait l’objet d’auditions en juin 2010 devant le Comité permanent du Patrimoine canadien de la Chambre des communes et le Comité du patrimoine, respectivement. Lions Gate a demandé avec insistance le rejet de la demande d’Icahn en faisant valoir qu’elle n’était pas à l’avantage net du Canada. Toutefois, le 9 juin 2010, le ministre du Patrimoine Canadien a approuvé l’opération en se fondant sur des engagements pris par M. Icahn à l’égard des activités culturelles canadiennes. À priori, et sans avoir accès à ces engagements, l’approbation semble déroger à la politique sur la distribution de films de Patrimoine Canadien. (Pour consulter notre article portant sur la décision de la Commission des valeurs mobilières de la Colombie-Britannique concernant l’interdiction d’opérations relativement au régime de droits des actionnaires de Lions Gate, cliquez ici.)

Peu de temps après que ces décisions aient été rendues, Patrimoine Canadien a publié le 20 juillet 2010 un document de travail intitulé « Investir dans l’avenir des livres canadiens ». Le gouvernement a dressé un portrait de l’historique des entreprises culturelles en se concentrant notamment sur la politique du livre et a entamé une consultation publique se terminant le 18 septembre 2010 afin d’obtenir des commentaires pertinents sur d’éventuels changements proposés à la politique du livre. Les options présentées par Patrimoine Canadien comprennent notamment les suivantes :

  1. maintenir la forme actuelle de la politique du livre;
  2. abolir les restrictions existantes dans un, deux ou les trois secteurs du livre (c.-à-d. l’édition, la distribution et la vente au détail);
  3. maintenir les restrictions relatives aux acquisitions d’entreprises de l’industrie du livre, mais abolir les restrictions imposées aux nouveaux venus;
  4. maintenir les restrictions imposées aux nouveaux venus, mais abolir les restrictions touchant les acquisitions d’entreprises du secteur du livre;
  5. réviser la politique pour un, deux ou les trois secteurs du livre afin de permettre l’acquisition et le contrôle par des intérêts étrangers d’entreprises du livre dans des circonstances particulières et sous réserve d’engagements relatifs à l’avantage net;
  6. modifier la politique afin de clarifier pourquoi elle ne s’applique pas à des types précis d’entreprises (c.-à-d. les entreprises accessoires qui vendent des livres au détail et les détaillants en ligne qui ne disposent pas d’une place d’affaire au Canada); et
  7. moderniser les engagements proposés tout en maintenant les restrictions actuelles liées au contrôle étranger.

Il s’agit d’une époque intéressante pour le secteur culturel au Canada, la révision de la politique du livre pouvant entraîner un examen et un assouplissement des autres restrictions (p.ex. de la politique du film). De plus, le fait de permettre à un non-Canadien de faire l’acquisition d’une entreprise de distribution et de production cinématographique canadienne pourrait aussi entraîner la modification de la politique du film. En 2006, le gouvernement du Canada a publié un document intitulé « Avantage Canada — Bâtir une économie forte pour les Canadiens », dans lequel le gouvernement indiquait qu’il s’efforcerait d’augmenter les investissements étrangers au Canada en révisant son cadre législatif à l’égard des investissements étrangers, y compris la Loi sur Investissement Canada. Pour faire suite à ce document, le gouvernement a créé en 2007 le Groupe d’étude sur les politiques en matière de concurrence, lequel a révisé la Loi sur Investissement Canada et s’est concentré sur le critère de l’avantage net. Toutefois, le processus de recherche et de consultation du groupe a fait clairement ressortir l’importance de protéger et de soutenir la culture canadienne, et le groupe a conclu que les nouvelles technologies et l’augmentation de l’exposition internationale créent de nouvelles occasions pour les entreprises culturelles canadiennes sur les marchés internationaux, ce qui signifie que le cadre culturel du Canada devra être mis à jour afin de tenir compte de ces nouvelles réalités.